Le Western n'est pas complètement mort. The Homesman, le dernier film de Tommy Lee Jones, en est son dernier représentant au cinéma, un western noir aux élans plus féministes que patriotiques (un comble !). Mais le plus étonnant, c’est que l’on peut très bien faire le rapprochement entre ce film et une des nouveautés BD du mois d’avril, Rouge comme la neige de Christian de Metter. Si vous avez aimé The Homesman, il ne fait aucun doute que vous allez adorer ce one-shot de 110 pages, qui nous plonge en plein Colorado pendant l’hiver 1896.
Scénario : On a donc affaire ici à une veuve mère de famille d’une trentaine d’année, madame McKinley et son fils Sean, qui apprennent le procès du ravisseur de la sœur de Sean, Abby, six ans auparavant. Ils s’y rendent immédiatement et apprennent qu’Abby est toujours vivante. Sauf que l’enleveur d’enfant est le seul à savoir où elle se trouve, et s’apprête à être pendu. Si je faisais le rapprochement plus haut entre The Homesman et cette BD, ce n’est pas seulement pour leur ambiance d’une noirceur pénétrante, mais pour deux autres choses. Tout d’abord, les deux œuvres ont comme personnage principale une femme forte et autoritaire, dont l’absence d’un mari l’a à la fois perturbée et rendue plus aguerrie. Ensuite, il y a l’omniprésence des décors : dans l’un la traversée d’un désert aride et vide, et dans l’autre de superbe décors de forêts et de plaines enneigées et boueuses, pas loin du film « Le Grand Silence », à admirer sans modération.
Dessin : Des planches très fouillées, avec des crayonnés foisonnant par-dessous un encrage très fin. De Metter, habitué à de petits formats de planches, déploie tout son talent dans de grandes cases, laissant beaucoup de place aux personnages. En ce qui concerne la mise en couleur, la monochromie mélangeant plusieurs teintes de marrons avec l’ajout de trams intelligemment placés marche parfaitement. A noter la présence du rouge dans certaines scènes, qui justifie pleinement le titre qui peut sembler étrange au premier abord.
Pour : Malgré que Christian de Metter se dise totalement libéré de l’influence de Ford, Leone et compagnie - il n’aime pas les westerns, son récit n’oublie pas de développer les thèmes récurrents du genre, comme le génocide honteux des amérindiens et le racisme envers les noirs au lendemain de la guerre de Sécession. Sans oublier la brillante séquence du procès, pertinent exemple de la justice américaine de l’époque, qui chercher plus à contenter la population qu’à trouver la vérité.
Contre : Les textes et les bulles en dérangeront certains, même si ce n’est pas le cas pour ma part. Il est toutefois évident que malgré le choix d’une police de caractère informatique plutôt agréable, cela reste moins attrayant qu’un lettrage à la main ; et le blanc des bulles non détourées contraste un peu trop avec les dessins, sans être choquant pour autant.
Pour conclure : C’est un sans-faute pour Christian de Metter, qui signe un titre immersif de par ses décors, passionnant de par ses personnages, et fascinant de par sa fin volontairement frustrante.