Est-il encore nécessaire de présenter *Donjon* ? Ce projet né de la collaboration initiale entre Lewis Trondheim et Joann Sfar. Cette grande saga du neuvième art se développe sur un grand nombre de séries qui comptent chacune une époque ou un aspect particulier de l’univers du Donjon. *Rubens Khan* est le premier tome d’un nouveau cycle intitulé *Antipodes* qui nous plongent dans un futur lointain…
L’histoire se construit autour de Robert, veilleur de nuit dans l’usine de son oncle Stanilas. Il s’agit d’un membre de la légendaire famille de Vaucanson dont le plus célèbre membre est Herbert, personnage central de la saga. Mais Robert n’a jamais connu son prestigieux aïeul. Nous sommes plongés dans un univers futuriste où les robots ont remplacé les automates. Nouvel héros, nouveaux protagonistes, nouvelles époques… Ce grand saut narratif va-t-il conserver l’âme du Donjon ?
Robert a eu le malheur d’être au mauvais endroit au mauvais moment. Son sens des valeurs et son courage ont dérangé des grandes pontes. Le résultat est qu’il se retrouve emprisonné avec son désir de vengeance. On découvre alors un personnage en mission, prêt à tout pour retrouver son fils qu’on lui a confisqué lors de son incarcération. Malgré les excès du personnage, on s’y attache et on souhaite sa réussite même si on n’est jamais sûr qu’il n’enfreindra pas quelques règles pour mener à bien ses projets.
Cet album sert de mise en place de ce nouveau cycle. Il présente un héros, des personnages, une ambiance, un lieu, des enjeux. A ce niveau-là, le cahier des charges est rempli. La rupture avec les univers précédents de *Donjon* est claire et l’immersion dans ce nouveau monde et cette époque se fait facilement. Néanmoins, il reste perturbant de quitter quasiment tous les codes de la « fantasy » qui faisait quand même partie des bases de la saga.
L’atmosphère urbaine et dure qui accompagne l’histoire rend la lecture moins légère que d’autres cycles de *Donjon*. Ce nouvel opus offre un ton plus noir à la saga. Il possède une identité propre qui enrichit l’ensemble. Je pense que le fidèle lecteur sera content de découvrir un nouveau pan de l’univers bien qu’il ait été, comme moi, un petit peu perturbé au départ. Mais la richesse ne nait-elle pas de la diversité ?
Côté dessins, le travail de Vince est intéressant. Son style particulier offre une identité et une personnalité à l’histoire. Il arrive à mettre en valeur la colère pré-apocalyptique qui accompagne la narration. Les illustrations sont également sublimées par le travail sur les couleurs. Vince confirme la richesse et la diversité des dessinateurs qui offrent leur talent à *Donjon*.
Pour conclure, *Rubeus Khan* offre une introduction plutôt réussie à ce nouveau cycle. Certes, on pourra regretter le lien apparemment lointain et succinct avec la trame originale. Néanmoins, l’esprit reste préservé à mes yeux. Je le conseille donc davantage aux familiers de l’univers qu’aux novices. En effet, il me semble important de connaître les codes de Donjon pour profiter pleinement de cette nouvelle aventure. Mais cela ne reste que mon point de vue…