Je n’ai jamais réussi à aller au bout de la lecture du roman de William Golding, et c’est donc avec appréhension que j’ai attaqué son adaptation. J’avais adoré le Jours de Sable d’Aimée de Jongh et j’étais curieuse de la retrouver sur un titre qui s’annonçait différent dès la couverture. Après la sécheresse des régions désertées des Etats-Unis, la jungle de cette île du Pacifique annonçait d’emblée un paysage plus humide et vivant.
Ce classique, publié pour la première fois en France en 1956, met en avant la reproduction de l’organisation sociale acquise d’un groupe d’enfants échoués qui luttent pour leur survie en gardant l’espoir d’être secourus par les adultes qui tardent pourtant à venir. Très rapidement deux clans se forment, l’un tourné vers la nécessité de se protéger et de signifier sa présence par un grand feu, l’autre plutôt tourné vers la chasse et le bonheur de profiter d’une liberté loin de l’autorité des adultes.
Mais si la chasse est une quasi nécessité à la survie de ces jeunes garçons, elle devient rapidement un plaisir cruel qui s’étend dans les jeux des plus grands asseyant par ce biais une façon leur autorité et leur pouvoir sur les plus jeunes. Ainsi Jack, chef du clan des chasseurs, offre à ses « hommes » la place d’organiser des guerres sanglantes qui conduisent inévitablement à la mort.
Aimée de Jongh parvient à saisir l’esprit du roman de W. Golding et sa vision plutôt pessimiste de l’organisation sociale par la prise du pouvoir et la mise en place de lois avec ce que cela sous-entend de transgressif. En nous plaçant dès le départ aux côtés de Ralph, elle nous le rend attachant malgré sa brusquerie et sa maladresse vis à vis de celui qui deviendra le souffre-douleur de la bande, Cochonnet.
De la même manière, elle saisit la cruauté de Jack et ses proches camarades au travers des traits durs, parfois ingrats de leurs visages. La beauté sauvage de l’île s’exprime dans des planches bourrées de détails qui rendent à merveille les paysages. Cette beauté vient contrebalancer la bestialité et la sauvagerie des « chasseurs » organisés en clan tribal dont la violence s’accroit à mesure que s’étiole leur humanité. La fin brutale de leur aventure sonne la fin de l’enfance !