N'ayant pas encore lu Come Prima, je découvrais avec Senso le travail d'Alfred en tant que scénariste, sur les conseils du responsable du rayon BD de la médiathèque de Tulle.
Les premières planches, sont très séduisantes (le reste le sera aussi). Des corps se cherchent, se désirent, se caressent. Érotisme, sensualité et sensibilité, le tout paraissant de prime abord déconnecté du récit.
Puis vient le temps de la narration. Unité de temps, unité de lieu, on suit les mésaventures de Germano, un homme au carrefour de sa vie. D'aucun dirait un loser, je préfère le voir comme quelqu'un de passif. Germano est une sorte d'éloge de la passivité. Dès qu'il entreprend des choses, il se couvre de ridicule ou passe à des années lumières de son objectif. Et c'est finalement dans l'inaction qu'il est le plus efficace. C'est dans l'immobilité qu'il se sublime. Parce que cette immobilité fait de lui un contemplatif. Capable de déceler le malaise d'un enfant solitaire que personne ne regarde plus et de voir la beauté d'Elena que personne ne semble plus désirer. Dans les deux cas, il oubliera d'agir, restera immobile, passif mais changera leur vie, sensiblement.
De ce carrefour Germano ne semble pas pouvoir partir. Et c'est donc la tornade Elena qui va l'en déloger. Elena toujours en mouvement, toujours en action. Elle se déplace, disparaît, revient, interagit, provoque les situations, quand Germano, l'attend, se perd, subit. De cette association naît une alchimie incompréhensible mais incoercible. L'amour ? La passion ? Est-cela qui se crée sous nos yeux et ceux de Germano spectateur perpétuel ? C'est possible et cela reste à écrire.
La narration se referme comme une parenthèse enchantée. Les corps du début se sont trouvés et dans une ultime pirouette font un clin d’œil à un récit sensible qui réunit deux êtres aux rythmes contradictoires.