Un portrait spectaculaire de la dépression

// CECI EST UNE CRITIQUE DE L'OEUVRE INTEGRALE //

Dans une ville où il ne se passe jamais rien, où chaque jour se ressemble, Reiji Kurose se contente du vide qui caractérise son existence. Tout le condamne à rester dans la même ville : sa famille, ses perspectives d'avenir, ses amis d'enfance.... Jusqu'à sa rencontre avec une idole, il était persuadé que sa vie continuerait ainsi, sans résistance et sans réel pouvoir sur son avenir. Vivre peut-il lui apporter l'espoir ? Se dirige-t-il vers la lumière ? Ou vers les ténèbres ?

Beaucoup de mangas nous ont fait pleurer ou fait réfléchir voire philosopher sur différents concepts après leur lecture. Boy's Abyss ne joue pas dans la même cour, et l'auteur peint un tableau très médiocre de ses personnages. Lire ce manga, c'est se confronter parfois à soi-même.

I/ Des personnages remarquables

En apparence, le manga se résume à un lycéen, Reiji, ne sachant pas quoi faire de son avenir, un peu la tête dans la lune. Sa vie n'est pas toute rose, certes, mais en faisant la rencontre de Nagi Aoe, le désire de se donner la mort bouscule sa vie et deviendra le fil conducteur du récit. Cependant, il repousse le jour de son suicide, comme s'il attendait le moment opportun et entraîne, à leurs dépends, les proches de Reiji.

Ce manga offre bien plus qu'une histoire triste mais aussi l'analyse de l'état de "dépression".

Tout d'abord, celui du craquage mental.

Spoil chap1 à chap 50 (exposition):

Chaque personnage passe à travers le même stade, celui du "mental breakdown" qui sera un moment décisif pour chacun. Ils s'ouvrent entièrement à leur interlocuteur, s'exposant corps (littéralement) et âme en espérant recevoir le salut ou une quelconque forme de compassion. C'est le cas pour Reiji face à Nagi, lors de leur 1ère tentative de suicide, Chacko face à Reiji et Shibasawa face à Reji aussi.

Mais ensuite, vient la partie plus olé-olé.

Spoil chap 1 à chap 50 :

Dans chaque cas, le chapitre se conclut par une scène de sexe, comme si leur manière de se libérer n'était que par le plaisir charnel, créant une dépendance affective de l'autre. Sauf pour Reiji. Reiji se confesse à Nagi et au lieu de faire comme d'hab, elle lui propose le suicide, car elle aussi, elle y avait déjà penser avant, elle assiste à ce qu'elle a déjà traversé. Ainsi Reiji devient le nouveau confessionnal de service, car lui, voit une fin possible à son calvaire.

Et pour finir, la dérive la plus totale à laquelle on sera le spectateur omniscient.

Le gros point fort de ce manga est donc bien les personnages, tous plus misérables et affreux les uns que les uns autres mais chaque acte cache un passé douloureux même traumatisant. Si le passé n'est pas le moteur, c'est alors un quotidien détesté, d'éternelle souffrance et sans fin. Vous n'allez pas me croire, mais on parvient à ce reconnaître dans les personnages par certains actes immoraux et totalement idiots qui sont présents comme un instinct primitif.

Le but commun : Quitter la ville. Mais personne n'y parvient, ils sont au centre d'un vortex les aspirant, un abysse. Mon personnage préféré sera toujours Chacko, qui illustre parfaitement à elle-seule la douleur de la désillusion et la confrontation d'un adolescent au monde d'adulte.

Pour toutes ces raisons, je recommande 1 000 fois ce manga, au moins les deux premiers tomes.

II/ Un fond qui ne parvient pas à suivre

Mis à part un développement de personnage juste phénoménale, le monde bâtit autour est trop fragile. L'auteur veut créer son petit théâtre, avec multiples retournements de situations et d'éléments perturbateurs. Mais un cliffhanger par chapitre sur 120, c'est trop.

De plus, le zoom sur la ville est peut-être trop important est on a du mal à suivre en arrivant vers le chapitre 60, peut-être que le monde qu'il/elle a voulu construire était trop grand et il était impossible de le condenser plus.

Un autre problème est malheureusement ce qui dois distinguer le manga de ses pairs : le personnage principal et son *abysse et la back story autour. Les flashbacks ne deviennent pas inintéressant, mais le concept d'abysse* est, je trouve, trop mis en avant et semble vouloir tout justifier, alors qu'il ne devrait être que métaphorique.

Autre petit bémol, Nagi Aoe, inspiratrice de Reiji, est je trouve pas assez présente malgré l'impact colossale qu'elle a sur sa santé mentale. Reiji n'attend qu'une chose, c'est de se suicider avec elle et pourtant elle disparait pendant une centaine de chapitre et c'est beaucoup trop. Certes, une des particularités de Reiji est d'être une victime de son sort et d'être trop passif, mais il survit néanmoins 1-2 ans sans la voir et en pensant encore à elle, alors qu'il a son numéro.

Si on cumule tout ses défauts, la lecture devient progressivement un peu trop lourde, légèrement ennuyante et on s'habitue aux surprises.

III/ Conclusion et mon avis

Même si j'ai eu plus de mal sur la fin, j'ai continuer pour assister aux ravages que subiront les personnages et on en ai pas privé ! Malgré ses quelques tâches, ce manga vaut largement le coût pour comprendre la psychologie et le fonctionnement d'un "dépressif" (je voudrais pas que ça sonne péjoratif, je vous aime beaucoup les dépressifs). Je me suis délecté de cette lecture, quasiment chaque chapitre fut un régal et je le recommande à tout le monde (déconseillé au moins de 18 ans, vraiment).

Bonne lecture <3