Un nouveau venu dans l'univers d'Hellboy, fortement ancré dans la continuité, tout en restant access

Il s'agit du début d'une nouvelle série connectée au Mignolaverse (les séries Hellboy et BPRD). Ce tome peut-être lu indépendamment de ces 2 séries, tout en restant compréhensible. Il contient les 2 premières miniséries, soit 5 épisodes, initialement parus en 2013, écrits par Mike Mignola & John Arcudi, avec une mise en couleurs de Dave Stewart.


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- Sledgehammer 44 (2 épisodes, dessinés et encrés par Jason Latour) - En 1944, dans une petite ville (fictive) de France (D'Ébène Chiot), une petite unité de 5 soldats doit servir de soutien à une autre unité qu'elle attend. L'unité en question est lâchée du ciel sur la ville. Elle a pour nom de code Sledgehammer : il s'agit d'une sorte de gros robot humanoïde à 3 yeux, qui doit combattre un gros robot nazi.


Dans la postface (1 page), John Arcudi explique que ce projet a été conçu à la demande de John Severin. Ce dernier avait illustré la deuxième aventure de Sir Edward Grey (Perdu corps et âme) à l'âge de 88 ans. Il souhaitait ensuite dessiner une histoire se déroulant pendant la seconde guerre mondiale ; malheureusement il est décédé après avoir réalisé seulement quelques planches (dont 2 incluses en fin d'ouvrage).


John Arcudi et Mike Mignola ont donc développé un nouveau personnage pour cette époque, s'intégrant dans le Mignolaverse, c'est-à-dire l'univers partagé d'Hellboy et du BPRD. Les lecteurs les plus attentifs identifieront la fourche d'Anum et la combinaison d'énergie Vril (voir Le Prométhée de fer). Les très, très, très attentifs se souviendront d'une case dans Les Morts (le tome 4 de la série BPRD) où l'on pouvait apercevoir l'armure de Sledgehammer.


Dans cette première histoire, il s'agit d'introduire le personnage en bonne et due forme, et de montrer ses capacités face à un gros robot nazi surarmé, et d'expliquer son lien avec le soldat américain Patrick Redding. L'histoire est rapide. Mignola et Arcudi réussissent à faire exister plusieurs personnages, à donner une identité distincte à 3 soldats, en ce nombre de pages limité. L'intrigue n'est pas très originale, mais elle remplit bien sa fonction de servir de support à l'introduction de Sledgehammer, permettant d'intégrer quelques notions sur sa source de pouvoir, son lien avec l'ange Anum, et la conscience humaine qui guide cet engin de destruction. Ils trouvent même le moyen d'inclure une dimension tragique au personnage.


Jason Latour détoure les formes avec un trait fin uniforme, un peu tremblé. Le niveau descriptif de ses dessins est satisfaisant, en particulier l'authenticité des uniformes américains. Il a choisi une approche un peu caricaturale pour la représentation des visages. L'effet comique est assez discret pour ne pas neutraliser ni la dimension tragique du récit, ni la tension narrative des affrontements.


Ces 2 premiers épisodes constituent un bon prologue, introduisant un nouveau personnage qui trouve naturellement son origine dans la riche mythologie du Mignolaverse.


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- Lightning war (3 épisodes, dessinés et encrés par Laurence Campbell) - Quelques mois plus tard, les nazis s'emparent d'un prototype d'avion, capturant aussi le pilote Danny Ellroy. Le docteur Helena Gallaragas réussit à faire sortir Sledghammer de sa léthargie et à le convaincre d'effectuer une mission de sauvetage pour délivrer Ellroy et récupérer le prototype.


À chaque nouvelle histoire, c'est un grand plaisir de constater le niveau d'aisance que John Arcudi et Mike Mignola ont atteint dans leur narration. Ici il suffit de quelques scènes pour rendre le récit personnel et impliquer émotionnellement le lecteur. Il y a donc la situation extraordinaire de Patrick Redding. Lorsqu'Helena Gallaragas (la fille du professeur Kiryakos Gallaragas, l'inventeur de la combinaison énérgie Vril) expose sa motivation à Sledgehammer, en 3 pages, ils ont fait passer sa personnalité, ils ont créé un personnage de femme forte et crédible, et ils ont acquis l'empathie du lecteur pour le reste du récit.


Ces 3 épisodes s'avèrent bien dense, faisant le lien avec une partie de la mythologie du BPRD : une incarnation de Black Flame (Raimund Diestel), la présence de Trevor Bruttenholm, la fourche d'Anum et l'évocation de Lobster Johnston. Les auteurs insèrent une référence à Épiméthée (l'un des Titans). L'intrigue recèle plusieurs surprises complexifiant la mission de sauvetage. Il est possible de regretter des combats trop basiques, Mignola & Arcudi jouant sur l'imprécision du niveau de pouvoir de Sledgehammer pour le sortir du pétrin comme bon les arrange.


D'un côté les dessins de Laurence Campbell sont plus épurés que ceux de Latour : moins de détails, beaucoup moins d'arrières plans. De l'autre côté, Campbell peaufine son encrage et ses ombres portées pour tirer ses dessins vers l'expressionnisme et installer une atmosphère pétrie d'une sourde fatalité, beaucoup plus prenante que la vision plus factuelle de Latour. Campbell bénéficie de toute l'intelligence de la mise en couleurs de Dave Stewart qui palie l'absence de décors par des camaïeux assurant la continuité de l'atmosphère d'une scène d'une case à l'autre tout en renforçant les textures, et en conférant de la substance à des cieux désespérément vides sinon. Grâce à Stewart, les pages contiennent assez d'informations visuelles pour ne pas sembler trop éthérées.


Cette deuxième histoire développe la situation du personnage principal, au cours d'une aventure rapide, disposant de personnages assez étoffé, de scènes d'action spectaculaire et d'enjeux dépassant le simple affrontement générique contre les nazis.

Presence
8
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Créée

le 9 févr. 2020

Critique lue 157 fois

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