Stardust Crusaders est probablement la partie la plus importante de tout JoJo's Bizarre Adventure. Non pas parce que c'est la meilleure, ni la plus ambitieuse ou la plus originale, mais parce que Araki y effectue des changements radicaux qui ont fait de JoJo l'œuvre que l'on connaît aujourd'hui. Quand je parle de changements radicaux, je parle bien évidemment d'un élément en particulier: les stands.
On se débarrasse définitivement de l'onde, système de magie trop simpliste et contraignant dont les limites étaient déjà poussées dans la partie 2. A la place, Araki décide d'installer un nouveau système en apparence très simple et donnant une liberté presque sans limite à son imagination débridée. Le concept de base des stands est simple: il s'agit de la manifestation physique de l'esprit combatif d'une personne dont le pouvoir reflètera sa personnalité. En d'autres termes, chaque personnage peut avoir absolument n'importe quel pouvoir. Dit comme ça, ça sonne comme une très mauvaise idée qui causerait un chaos complet mais Araki fait bien attention de ne pas créer de stands permettant un win automatique. Certains sont absurdement forts (The World dans cette partie et plus tard King Crimson, Made In Heaven, Tusk Act 4...) mais il y a toujours un moyen de battre son adversaire. Et les combats sont souvent assez bien gérés pour ne pas être un bordel incompréhensible.
Une idée simple, et maintenant les possibilités sont infinies. Chaque combat aura ainsi sa propre identité grâce aux capacités uniques qui s'affrontent et forcent constamment les protagonistes à utiliser leur tête pour exploiter leur stand et les faiblesses du stand adverse afin de gagner. Mais non seulement cette idée est un gigantesque agrandissement du champ des possibilités mais elle permet à JoJo de s'exprimer pleinement dans sa bizarrerie avec les stands que peuvent posséder les personnages. C'est peu le cas dans Stardust où les pouvoirs de stands sont les moins originaux (même si quelques pépites sortent du lot comme Hermit Purple ou Osiris) voire sont parfois de mauvaises idées (wheel of fortune notamment est vraiment sans intérêt).
L'autre élément important introduit par la partie 3 est l'apparition du personnage le plus emblématique de JoJo: Jotaro Kujo. C'est là où je vais me calmer dans mes éloges car Jotaro est un personnage que j'ai eu du mal à apprécier dans Stardust. Je le trouvais trop antipathique et sans grande profondeur. Il me semblait que Araki avait fait un pas en arrière comparé à Joseph. Les deux sont des personnes à l'apparence peu recommandable mais cachant un grand cœur mais Jotaro manque cruellement de personnalité, en tout cas dans Stardust. Les choses s'améliorent sur les 5 derniers volumes où il a davantage l'occasion de se mettre en valeur mais, la majorité du temps, les autres personnages du groupe (particulièrement Polnareff) lui font de l'ombre. Ces personnages sont cependant une qualité de la partie. Là où les personnages secondaires des précédentes parties ont une tendance au sous-développement, Araki a ici réussi à gérer une équipe de 5, plus tard 6, personnages ayant tous une personnalité propre (malgré les défauts énoncés plus tôt pour Jotaro) mais marchant très bien en tant que groupe. Il existe une dynamique particulière dans chaque relation entre les personnages ce qui les rend bien plus attachants. On reste cependant loin du développement de personnages qu'on retrouvera dans les prochaines parties.
Malgré les points rendant absolument mémorables la partie, ses combats et personnages iconiques, c'est pourtant une partie que je n'apprécie pas forcément à sa juste valeur et ce à cause d'un aspect qui, ironiquement, est à l'origine de son succès lors de sa publication. Je parle du format "méchant de la semaine" que prend la structure de l'histoire. La partie consiste en un voyage du Japon vers l'Egypte dont chaque étape sera marquée par un combat de stand. Pour résumer la partie, le groupe affronte un antagoniste mineur, puis un autre, puis un autre, puis un autre, puis un autre, etc., jusqu'à atteindre le boss final. ce format permettait à n'importe qui de lire les nouveaux chapitres dans le Shonen Jump et de les apprécier sans forcément avoir conscience de tout le contexte de la partie et a donc grandement contribué à l'explosion en popularité du manga dans la fin des années 80. Quand on lit tout à la suite, ça devient malheureusement très répétitif, voire monotone. C'est une critique qui est un peu de mauvaise foi car ce format est retrouvé dans presque chacune des parties de JoJo mais Araki le réalise souvent avec plus de subtilité, faisant passer ces enchaînement de combats comme les différentes étapes de l'aventure. Ici, l'enchaînement est presque mécanique. L'histoire en est moins rythmée que enfermée et c'est pour ça que j'ai beaucoup de mal avec Stardust Crusaders et c'est vraiment dommage vu l'importance de la partie et tout ce qu'elle apporte à la série dans son ensemble. Ca reste une partie mémorable aux combats iconique (on parle souvent de the World mais je trouve le combat contre D'Arby the Gambler absolument jouissif) et aux personnages hauts en couleur (surtout cet enfant de Polnareff) et surtout, l'entrée du système des stands qui ne fera que s'améliorer dans les prochaines parties.
Mention spéciale au voyage à travers une énorme diversité de cultures que permet la partie. Araki est un amoureux de toutes les cultures qu'offre l'humanité et il nous le fait bien sentir dans Stardust.