Critique et extraits: http://wp.me/p5dAdU-3aS
Entre deux croques-morts, Stern et l'Undertaker (dont on vous parlera d'ici quelques jours pour la sortie du deuxième tome), on revient à la bonne vieille tradition du western pur jus grâce à Pierre Dubois et Dimitri Armand (oui oui, le même qui vient de nous gratifier d'une excellente et moderne reprise de Bob Morane) et à un shérif crépusculaire bien dépoussiéré. Ça s'appelle Sykes et ça nous prouve, une fois de plus, que le western a encore bien des choses à montrer et à prouver dans le format dessiné.
Une ombre jetée sur une chemin sillonnant jusqu'à une fermette. Le temps d'une planche d'ouverture, d'une image plein cadre, on pourrait presque se croire au monde de Mickey et de ses contes enchanteurs. Pourtant, très vite, ça va déraper. L'ombre, c'est "Sentence" Sykes, shérif craint et virtuose du colt. Sa présence dans le coin n'augure rien de bon. De dangereux rôdeurs assoiffés de sang et de chair traînent dans les parages. Il a d'ailleurs tôt fait d'en avertir le jeune Jim et sa mère, qui lui offrent tout en se méfiant de quoi s'abreuver.
Mais que valent des avertissements quand on se croit fort et résistant, endurcis par la mort trop rapide d'un mari, d'un père. Et Sykes a à peine le temps de rejoindre la town que l'irrémédiable se passe. Le petit ranch est ravagé par la cupidité des malfrats et le petit John se retrouve seul avec sa mère laissée violée et morte. Commence alors pour Sykes et le petit Jim, une chasse à l'homme à l'issue fatale, où se baladent encore quelques fantômes d'une vie regrettée.
De la lumière du début, on n'en retiendra pas grand chose au final, tant ce one shot de superbe facture s'enfonce dans la violence, la hargne, la rage et la vengeance. Dans cette passation de pouvoir et d'héritage bien amenée et absolument imprévisible, Dubois arrive parfaitement à recycler les grands thèmes du western (du duel au canyon, en passant par l'indien futé et les méchants aux noirs desseins acérés) pour les intégrer à une histoire âpre et terriblement moderne.
Encore plus par le traitement graphique (et le découpage qui lui est assorti) d'une rare beauté que Dimitri Armand a su conférer à cette histoire de cowboys qui tirent bien plus vite que leur ombre mais n'ont pas réussi à enterrer leur passé et leurs désillusions. Les scènes de combat, quasi-rituelles, sont époustouflantes et ne peuvent qu'éclabousser le lecteur de leur audace. La sentence est unanime: Sykes a la force des plus grands classiques. Si la BD ne vous avait pas encore réconcilié avec le genre ces derniers mois, voilà une occasion en or!