Il s'agit d'une nouvelle série lancée par DC Comics en 2011, à l'occasion de la remise à zéro de l'univers partagé dans le cadre de l'opération baptisée New 52. Ce tome contient les épisodes 1 à 6 de la série, parus en 2011/2012. Il s'agit du début de la série.


À Boston, un homme en pantalon et sans chemise plante un pieu dans le corps d'un vampire encore en vie, puis le décapite à l'épée. Cet homme est Andrew Bennett, il est lui aussi un vampire, âgé de 400 ans. Cette artère de Boston est jonchée de cadavres de vampires empilés les uns sur les autres. Parallèlement à ce qui semble être le temps présent, Bennett se souvient de sa dernière rencontre avec Mary Seward, une autre vampire, plus jeune, l'amour de sa vie. Ils avaient une vision diamétralement opposée de la place des vampires parmi les humains, ce qui a conduit à leur séparation. Il est partisan d'une vie la nuit, en harmonie avec les êtres humains ; elle veut imposer le règne des vampires sur terre et se nourrir à satiété. À Boston, Bennett est sur la trace de Mary, mais elle a déjà eu le temps d'organiser une petite armée à sa suite. Leur course-poursuite va les mener jusqu'à Gotham où Bennett devra faire face à Batman, pas très heureux de découvrir un train rempli de cadavres exsangues.


En 2011, DC Comics lance 52 nouvelles séries. Il y a celles qui constituent autant d'évidence (Superman, Batman, Green Lantern, Wonder Woman) et quelques unes que personne n'attendait comme celle de "I, vampire". Il s'agit pour DC Comics de faire fructifier son catalogue de personnages et voir ce qui marche au bout de quelques mois. Ça marche, la série est confirmée ; les lecteurs n'achètent pas, la série s'arrête et est remplacée par une autre. Celle de "I, vampire" s'est suffisamment vendue pour survivre aux 2 premières vagues de nettoyage.


Dès la première, le lecteur est frappé par le style marqué du graphisme. Les illustrations sont réalisées par Andrea Sorrentino dont l'approche esthétique est très proche de celle de Jae Lee pour Fantastic Four 1234 et The Sentry. Sorrentino utilise donc un encrage appuyé dont les formes ne se limitent à pas à détourer les contours ou figurer les ombrages. L'encrage plonge les visages et les personnages dans des ombres qui semblent les recouvrir petit à petit, ou au contraire qui délimitent des contours aux angles vifs pour figurer la dangerosité, le tranchant de leur personnalité. Cette utilisation de l'encrage a aussi pour effet d'accentuer la noirceur du récit, la gravité, la solennité, le tragique, la force du destin, bref : l'ambiance gothique. Dès la première page, cette approche graphique fait sens, et augmente fortement l'intensité du récit. Il faut voir ce pieu noir être enfoncé de force dans le corps d'un vampire avec le sang qui gicle (tout représenté avec le noir de l'encrage, sauf pour le sang carmin foncé) pour se rendre compte de la force que ce geste exige, de l'horreur de cette action (même si le cadavre n'est pas visible à l'image), de la détermination que cela exige de la part de l'exécuteur. Tout au long du récit, cette façon de représenter des individus appartenant plus à l'ombre qu'à la lumière aux contours pointus s'accorde parfaitement avec le peuple de la nuit que sont les vampires. La mise en couleurs assez sombre de Marcelo Maiolo s'inspire de celle de Jose Villarrubia (metteur en couleurs de "Fantastic Four 1234") avec des teintes sombres (bien sûr) essentiellement dans les bruns ou vert foncés.


Même si Sorrentino reproduit la tendance de Jae Lee à s'économiser sur les décors, il le fait moins et il est capable de créer des endroits spécifiques, à nouveau en totale adéquation avec ce récit de vampires. La rue de Boston jonchée de vampires conduit le lecteur à s'interroger sur le fait qu'aucune personne (passant ou policier) ne s'inquiète d'un tel carnage. Par la suite ce petit défaut de mise en scène disparaît et le lecteur visite des lieux dérangeants dans leur apparence, comme une station de métro, une énorme salle souterraine avec voute, les abords de la gare de Gotham sous une lumière blafarde, etc. En prime, Sorrentino sait créer des pleines pages ou des doubles pages marquantes telles Mary Seward dont la nudité ne semble être masquée que par de fins filaments de sang, Bennett s'élançant sabre au clair, une marée de vampires s'élançant sur Bennett, une chauve-souris les ailes grand écartées, etc.


Joshua Hale Fialkov a la tâche peu enviable de faire croire à l'existence de vampires dans l'univers partagé DC. Cette mission s'avère délicate car il doit trouver un équilibre vraisemblable entre la menace réelle des vampires s'attaquant à la population humaine, et le fait que leurs crimes ne déclenchent pas une extermination en règle contre les innombrables superhéros de cet univers. Dès le début, Fialkov fait dire à Bennett que les vampires doivent être prudents car ils ne tiendront pas bien longtemps face à Superman. Au fil des épisodes Bennett croise le chemin de Batman, mais aussi d'un des membres de Justice League Dark. Il n'y a donc pas de doute possible : ces vampires évoluent bien dans le monde des superhéros. Le récit raconte plusieurs affrontements entre Andrew Bennett et les partisans de Mary Seward, tout en dévoilant au fur et à mesure les relations passées entre Andrew et Mary. Il installe également 2 personnages secondaires que sont Tig Rafelson et John Troughton. Le lecteur découvre au fur et à mesure les règles qui régissent les vampires dans l'univers DC, ainsi que les motifs de la séparation entre Mary et Andrew. La narration n'est pas très dense, mais l'intrigue comporte suffisamment de révélations pour donner envie de connaître la suite.


L'éditeur DC Comics a fait le pari surprenant de lancer une série de vampires dans son univers partagé avec des personnages très peu connus. Joshua Hal Fialkov et Andrea Sorrentino réalisent une histoire violente et sombre, capturant l'aspect gothique des vampires, avec un fond d'amour romantique contrarié. Les apparitions de 2 personnages de l'univers DC ne rompent pas l'ambiance particulière de cette série.

Presence
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le 18 oct. 2020

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