Comme l’arche de Noé en son temps, le Transperceneige constitue l’ultime espoir de survie de l’humanité. Celle-ci est à l’agonie, non pas suite au déluge, mais bien à la glaciation de la planète Terre. Alors, pour survivre à cette catastrophe, les Hommes se sont réfugiés dans un train hors du commun, dont les péripéties ont fait vibrer plusieurs générations de bédéphiles depuis son lancement, dans les années 80, jusqu’à nos jours.
Relancer la saga du Transperceneige aujourd’hui constituait vraisemblablement un défi de taille, puisqu’il fallait faire avec l’adaptation cinématographique du réalisateur coréen Bong Joon-Ho qui, sans nécessairement convaincre à l’unanimité les adeptes de la série, a très certainement marqué durablement et au fer rouge l’imaginaire du Transperceneige. Sans exagérer, nous pouvons affirmer que le défi a été relevé avec succès !
Mais voyons de quoi il retourne d’un peu plus près…
Terminus, ne fût-ce que par son titre, laisse d’emblée supposer que l’interminable périple du Transperceneige va prendre fin. Et les attentes suscitées ne déçoivent pas : car le train trouvera bel et bien quelque îlot où décharger ses rescapés. Mais cet îlot va-t-il s’avérer un havre de paix ou un endroit hostile et dangereux ? Les passagers trouveront-ils quelque repos à leurs existences nomades et miséreuses ?
À l’origine, l’aventure du Transperceneige fut imaginée par Jacques Lob, qui s’était rapidement accoquiné du dessinateur Jean-Marc Rochette pour donner vie à son projet. Lob a ensuite cédé sa place à un second scénariste : Benjamin Legrand. Si Rochette est toujours resté fidèle au poste, Legrand a quitté le navire à son tour. Une perte pas si regrettable, quand on sait que ce départ a permis à O. Bocquet de prendre le train en marche et, de toute évidence, ce dernier regorgeait d’idées fécondes pour relancer la série de plus belle.
Fidèle au genre de la dystopie et de la fiction post-apocalyptique, avec Terminus, le duo critique en filigrane les travers de nos société contemporaines, à travers des thèmes tels que celui des camps de concentration pour migrants, les dérives de l’eugénisme ou encore les dangers croissants de l’énergie nucléaire.
Enfin, mention spéciale aux dessins de Rochette qui, bien entendu, supportent le propos de Bocquet avec une éloquence épaisse et douloureuse. Ses traits sont rudes et hachurés, les tons sombres et ternes. Tout cela s’ancre avec le récit dans une harmonie parfois troublante par son exactitude, et le lecteur ne peut que se laisser emporter par l’ambiance inconfortable du Transperceneige.