Ce tome fait suite à A force to be reckoned with (épisodes 1 à 6). Il contient les épisodes 7 à 11, initialement parus en 1994, écrits, dessinés et encrés par Erik Larsen, le créateur du personnage.


Dart, Ricochet & Barbaric, Horridus, Rapture et Mighty Man ont quitté la police de Chicago pour former un groupe indépendant Freak Force (FF, en clin d'oeil aux Fantastic Four). Savage Dragon est à nouveau le seul individu à superpouvoirs de la police. Épisode 7 - Le lieutenant Frank Darling et Savage Dragon ont obtenu un mandat d'arrêt à l'encontre d'Overlord. Ils tentent de l'arrêter chez lui. Épisode 8 - Savage Dragon est grièvement blessé et il doit encore se défendre contre Cutthroat et Hellrazor. Épisode 9 - The Mace (Burt West) est un nouveau superhéros aux méthodes expéditives qui s'occupe de la pègre de Chicago en l'absence de Savage Dragon. Ce dernier doit repousser l'attaque brutale de SuperPatriot (Johnny Quincy Armstrong). Épisode 10 - Un étrange gugusse dénommé Jimbo the mighty Lobster (avec des pinces à la place des mains) débarque à Chicago et s'attaque à Savage Dragon pour prouver qu'il est le plus fort. Épisode 11 - The Fiend a pris possession de Doug Herman pour attaquer Savage Dragon. Ce dernier voit son dîner en tête à tête avec Sharona Jackson (Rapture) interrompu par Vanguard et Wally qui viennent récupérer Lurch.


Ce troisième tome est dans la continuité directe des 2 précédents : Erik Larsen poursuit sa série de superhéros à la fois, dérivative et parodique, mais aussi totalement premier degré. Pour un lecteur non averti, la dimension parodique produit un effet de simple exagération amplifiant les composantes les plus débiles des superhéros. Il y a la largeur d'épaule de Savage Dragon (et de plusieurs autres personnages masculins) absolument impossible, exagérée au point d'en être absurde. Il y a l'épaisseur des muscles de son avant bras, 5 fois plus gros que ceux de sa cuisse. Et ne parlons pas de la taille de ses poings rapportée à celle de sa tête. Erik Larsen adopte les conventions de représentation des personnages féminins dans les comics de superhéros, et là encore les poussent à leur paroxysme jusqu'à l'absurde (seins hypertrophiés et suspendus comme s'ils n'étaient pas soumis à la loi de la gravitation), taille de guêpe, costumes très révélateurs leur rentrant dans les fesses. Cette approche s'applique également aux robots ou cyborgs tels que SuperPatriot capable d'éjecter un nombre de douilles ahurissant par seconde (mais où range-t-il toutes ces munitions ?), aux superhéros dispensant une justice sommaire (Mace éclate les criminels à coups de masse d'arme), et même aux supercriminels (le ridicule Cutthroat avec une lame courbe d'un bon mètre de long à la place de la main droite).


Non seulement cette approche exagérée s'applique à la partie visuelle, mais également au scénario. Un épisode de Savage Dragon sans un combat physique à main nue est tout bonnement impensable. Dragon dispose d'une force herculéenne et quand il frappe un ennemi, celui-ci décolle du sol et va s'encastrer dans un mur, avec moult débris. Quand Dragon encaisse, les plaies saignent et lui aussi en prend plein la figure. La raison d'être principal de l'épisode 10 est l'affrontement physique entre Savage Dragon et Jimbo (tous les 2 cognant comme des sourds) pour savoir qui sera le plus fort (Jimbo étant le personnage d'un lecteur ayant gagné un concours pour qu'il apparaisse dans cet épisode). En y regardant de plus près, le combat entre Savage Dragon contre Cuttrhoat et Hellrazor occupe plus d'un tiers de l'épisode 8. Il en va de même pour l'affrontement entre Dragon et SuperPatriot dans l'épisode 9.


Dans l'introduction, Erik Larsen précise l'une de ses influences : un épisode de Thor réalisé par Walter Simonson composé uniquement de dessins pleine page. C'est de cette manière qu'il illustre l'épisode 7. Il est d'ailleurs facile de voir dans Overlord, l'influence de Doctor Doom, tous les 2 étant dans une armure, avec une grande cape et une façon de parler quelque peu altière. Par la suite, le lecteur attentif détectera dans l'épisode 11 l'influence de Frank Miller, dans l'utilisation des journaux télévisés et dans l'usage conceptuel des ombres. Erik Larsen s'amuse à essayer des dispositifs narratifs ou visuels repérés chez ses confrères, sans tomber dans le plagiat.


Toutefois, Savage Dragon ne se lit jamais comme un collage d'influences hétéroclites, mais présente au contraire une unité impressionnante. Du début à la fin, tout est d'Erik Larsen qui met en scène la vie de Savage Dragon. Il apparaît que le choix de ne pas donner un costume de superhéros à Savage Dragon s'avère des plus efficaces. Larsen ne raconte des bagarres entrecoupées par des tranches de vie privée plus ou moins intéressantes. Il raconte la vie professionnelle et privée de Savage Dragon qui est d'un seul tenant. Ces histoires sont aussi savoureuses par leur aspect parodique que pour la psychologie simple de Dragon (faire son boulot de son mieux, draguer Sharona) qui a foi dans l'utilité de son travail et dans la nécessité de faire appliquer la loi (profession de foi aussi simple qu'honnête). La composante parodique destine ces récits à un lecteur familier des superhéros et des conventions associées à ce genre. Un lecteur novice en la matière aura du mal à dépasser les exagérations politiquement incorrectes de Larsen. Un lecteur coutumier saura les identifier pour ce qu'elles sont, et les savourer comme autant de taquineries envers le lecteur qui est venu chercher des exagérations anatomiques et des coups de poing à la puissance démesurée. Ce type de lecteur sera plus à même d'apprécier la richesse de l'environnement dans lequel évolue Savage Dragon (une quinzaine de personnages différents dans chaque épisode), les références à d'autres artistes ou d'autres personnages, ainsi que la dextérité avec laquelle Larsen utilise les conventions du genre, les exagère et en tire de nouvelles variations.


Certes Savage Dragon est un concentré de clichés avec un héros qui règle ses problèmes en tapant dessus jusqu'à ce qu'ils disparaissent, et qui guérit de n'importe quelle blessure, quelle que soit sa gravité. Mais cela n'enlève rien au plaisir de lecture de le voir s'arracher à une antenne enfoncée dans sa poitrine, de le voir combattre 2 supercriminels idiots (alors qu'il s'est vidé de la moitié de son sang), etc. Larsen embrasse toutes les composantes les plus idiotes des superhéros en les traitant au premier degré, pour une narration viscérale et riche. Il crée également des séquences réellement horrifiques, telles The Fiend insérant ses doigts sous la peau du crâne de Savage Dragon, fouaillant le peu de chair (vision inconfortable, viscérale et inoubliable). Savage Dragon continue d'encaisser dans Possessed (épisodes 12 à 16, une partie de l'épisode 14 de la série "WildCats").

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le 24 avr. 2022

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