Commençons par un petit résumé du livre : Hamaguchi est un jeune dessinateur en quête d'une passion reléguée au rang de simple activité. Lui qui s'imaginait dessiner des modèles pour une entreprise de textile à Kyoto, il se retrouve à s'occuper de la réception des produits commandés aux ateliers de tissage et de la livraison auprès des détaillants. Alors, dès qu'il en a l'occasion, le jeune Hamaguchi se rend au zoo avec son carnet de croquis et plait à dessiner les animaux alentours. Lorsqu'il se retrouve à s'occuper de la fille de son patron, déshonorée pour avoir trompé son mari, il sent le vent tourner et décide de partir pour Tokyo pour travailler comme assistant d'un grand dessinateur de manga. Vient alors les temps de l'incertitude, du devenir des rêves, mêlés à ceux de la passion et de l'insouciance. Hamaguchi poursuit son chemin dans l'immense ville japonaise, son crayon à la main, tentant par tous les moyens de suivre la voie qu'il s'est choisi.
Oui, Un Zoo en hiver est une vraie bouffée d'air frais dans le monde du manga, tout comme toutes les œuvres de Taniguchi. A une heure où shonens et shojos envahissent les tables des libraires pour présenter toujours plus de coups d'estoc, de poitrines disproportionnées et de ninjas bourrés de magie, l'ouvrage de Taniguchi devient une petite perle dans un monde de brutes. Simple, pure et éclatante. Loin de tous les clichés apposés aux mangas habituels, Un Zoo en hiver reste une œuvre entière où héros et auteur se mélangent pour offrir au lecteur un instant de sérénité. Taniguchi nous présente une tranche de vie comme seul lui sait le faire, et c'est un réel plaisir de se plonger dans cette histoire qui, bien que banale, n'en reste pas moins tout simplement humaine. Les dessins permettent une immersion directe dans l'ouvrage, tout comme les dialogue sans fioritures. Ici, pas d'onomatopées outrancières et de débordements hachés, juste des cases qui se succèdent les unes aux autres dans un ordre clair et précis. Car Taniguchi possède ce don précieux de donner un peu de vie dans ses dessins, dans ses histoires qui brillent sous nos yeux comme brillent ceux des visiteurs dans un zoo en hiver.
Allez, quoi de mieux qu'une citation de l'auteur pour clôturer un article ? Rien, surtout quand ça éclaire le lecteur sur l'oeuvre du maître. C'est parti :
« Je pense que les hommes et les animaux sont essentiellement des êtres tranquilles pour lesquels une certaine réserve, une certaine discrétion, sont des moyens de survivre. Dans la vie quotidienne, on ne voit pas souvent des gens hurler ou pleurer en se roulant par terre. Si mes mangas ont quelque chose d'asiatique, c'est peut-être parce que je m'attache à rendre au plus près la réalité quotidienne des sentiments des personnages. Si on y pénètre en profondeur, une histoire peut apparaître même dans les plus petits et les plus banals événements du quotidien. C'est à partir de ces moments infimes que je crée mes mangas. »
(Jirô Taniguchi, dans un entretien donné à jean-Philippe Toussaint pour le site www.saka.info)