Et tu sauras pourquoi mon nom est l'Eternel

Ma note initiale de 2014 était de 8 avec le coup de cœur, mais ma relecture m'a fait du mal. Je baisse donc la note de 3 points et explique en fin de critique pourquoi, mais je laisse le texte initial au début par soucis d'honnêteté.

Universal War One est un feuilleton de 6 BD de science-fiction ambitieux. Un univers adapté au space-opera avec ses innombrables vaisseaux spatiaux détaillés, beaucoup d'explications et de théories scientifiques à propos du voyage dans le temps, des images superbes de l'Espace et des personnages travaillés qui vont se retrouver dans une épopée consistant en une belle fuite en avant, chaque tome amenant de nouveaux enjeux. On démarre avec un simple problème scientifique : une énorme masse de substance noire non identifiée, appelée le Mur, apparaît soudainement à proximité de Saturne. L'équipe Purgatory, composée de soldats de l'United Earthes Force repris de justice, va tenter d'en apprendre plus tandis que ce Mur va apporter de gros bouleversements dans l'univers. Ces rebuts de l'armée vont aller d'épreuve en épreuve...

Universal War One n'est pas un récit politique façon Trône de Fer comme son titre pourrait le suggérer. C'est plus une histoire d'aventures menées par Purgatory pour déjouer un complot, chaque tome se terminant sur un cliffhanger. Les personnages sont bien écrits et forts intéressants, malgré le fait qu'ils ne soient définis que par un trait de personnalité qui est rappelé trop souvent dans les 2 premiers tomes. Balti est le casse-cou, Mario le lâche qui a des complexes, etc... L'évolution des personnages se fera systématiquement sur leur trait. C'est un peu martelé, même quand on nous présente leurs fautes les amenant à rejoindre Purgatory, l'auteur trouve le moyen de lier ça à leur personnalité. Et pareil lors des flashbacks de chaque tome qui présentent un personnage, j'aurai bien aimé qu'on insiste un peu moins là dessus. Dommage car ils sont finalement assez touchants et pas si cliché que ça ces gars. Arrivé au 3e tome ça se calme, donc on peut dire que c'est largement supportable.

Les péripéties qu'ils vont subir sont bien trouvées et renouvellent continuellement l'histoire. Elles sont servies par des dessins qui subliment les envolées spatiales. Les théories scientifiques sont présentées avec parcimonie et servent l'histoire. On obtient ainsi un récit véritablement haletant qui sait poser ses testicules sur la table avec divers drames. Les références bibliques qui collent aux situations continuent de nous intriguer. En clair, le scénario et les images justifient pleinement mon coup de cœur.

Malgré tout on trouve des maladresses qui me font grincer des dents. J'en ai déjà cité quelques unes, mais j'ajoute aussi quelques clichés énervants (bouh je porte un long imper' noir et un casque allemand qui cache mon visage, je suis du côté des méchants !), quelques situations prévisibles qui auraient donc du être mieux amenées, et surtout, SURTOUT, des Deus Ex Machina insupportables. Et ils sont tous dus au voyage temporel qui sert ici à justifier tout et n'importe quoi. La fin est très décevante à cause de ça, ça ne veut plus rien dire à ce niveau là. Cette BD est la preuve même qu'il y a une certaine façon de voir le voyage dans le temps qu'il faudrait que les scénaristes de SF oublient, c'est trop facile de balancer ça comme ça. Et arrêtez de tenter de justifier ça, c'est juste de la facilité scénaristique et cette BD le montre de façon frappante. Je resterai un grand partisan de la théorie des multivers, c'est peut-être une aberration au niveau de la physique (comme le voyage dans le passé finalement) mais au moins il y a un minimum de logique.

Malgré cette note de fin négative, cette série vaut clairement le coup d’œil. Je suis bien content d'avoir profité de l'intégrale, j'aurai beaucoup souffert d'attendre un an entre chaque morceau. C'est peut-être ce qui m'attend pour Universal War Two qui n'en est qu'à son 2e tome...

EDIT de 2020 : Aïe que cette relecture ne m'a pas fait du bien. C'est toujours indéniablement beau et les explications techniques touffues gardent de l'intérêt, le rythme est également bien géré et on a des moments assez puissants. Mais la partie que je dénonçais déjà sur l'utilisation du voyage dans le temps pour faire n'importe quoi, elle me tue encore plus qu'avant. Il y a une part beaucoup trop importante des événements qui sont justifiés par "On a vu que c'était arrivé, donc maintenant qu'on est retourné dans le passé il faut que ça arrive", faisant de ces situations des prophéties auto-réalisatrices complètement artificielles. C'est poussé jusqu'à l'absurde avec tous les paradoxes de l'écrivain possibles, mais en se prenant complètement au sérieux. Ce monde et ces décisions en perdent tout leur sens, culminant dans un tome 6 qui nous prend pour des jambons. Cela rendait la lecture très agaçante.

En plus de ça la série se prend parfois les pieds dans le tapis pour quelques autres trucs. Je n'ai crû en aucun des couples qui se formaient, ça sortait de nulle part et sans justesse. La relation violeur/violée, c'est vraiment mais alors vraiment mal vu et totalement fantasmé. Par contre Mario est plus traité que dans mes souvenirs, un bon point pour ça... jusqu'à ses dernières apparitions où son développement part en vrille. Kalish est parfois complètement cheaté, révolutionnant les lois de la physique comme on finit son DM de maths. Et la comparaison aux récits bibliques est amusante un temps, mais sa conclusion a des relents de glorification sectaire dérangeante.

Il serait malhonnête de prétendre que je ne retire que du mal de cette série. Ses qualité sont indéniables et la lecture ne manque pas d'intérêt, mais les défauts sont vraiment rédhibitoires.