Ce tome fait suite à Usagi Yojimbo, tome 24 (épisodes 103 à 109) qu'il n'est pas indispensable d'avoir lu avant. Néanmoins comme la série met en scène des personnages récurrents, la lecture gagne en saveur si le lecteur est familier des tomes précédents. Celui-ci contient les épisodes 110 à 116, ainsi que l'histoire courte incluse dans Dark Horse presents 18, initialement parus en 2008, écrits, dessinés et encrés par Stan Sakai. Il s'agit d'une série en noir & blanc. Ce tome commence avec une introduction rédigée par Floyd Norman qui dit tout le bien qu'il pense de Stan Sakai, en tant qu'ami. L'intérêt réside donc plus dans le portrait d'un individu que dans un nouvel éclairage du comics.
Épisode 110 - Miyamoto Usagi et Murakami Gennosuke se sont arrêtés sur la place d'un village pour observer Sakura (une femme avec quelques cheveux blancs) réaliser un tour de prestidigitation, avec une pêche et un tokage (lézard). Usagi lui donne de l'argent, Gennosuke non. Placé devant 2 chemins menant au village suivant, ils décident d'en prendre chacun un différent, le premier arrivé au village attendant l'autre. Gennosuke devient le jouet de 2 esprits renards facétieux. Épisodes 111 & 112 - Arrivés aux abords du village suivant, Usagi et Gennosuke voient Sakura en passe de se faire attaquer et détrousser par un groupe de 4 malandrins. Usagi découvre alors qu'elle sait se défendre et qu'elle connaît Gennosuke. Les 2 compères s'installent dans une auberge, pendant que Sakura va proposer ses services de croupière au boss Kaneko. Prise de pitié pour la jeune Momo, elle décide de l'enlever à Kaneko.
Épisode 113 - Miyamoto Usagi et Murakami Gennosuke sont arrivés dans un nouveau village où ils recherchent des indices sur la localisation d'un individu dont la tête est mise à prix. Ils acceptent de rémunérer un mouchard pour obtenir des indices. Celui-ci joue double jeu en faisant monter les enchères avec un autre chasseur de prime (Inukai, Stray Dog) à l'insu des 2 parties. Épisode 114 - Se déplaçant de village en village Miyamoto Usagi finit par repérer qu'il croise souvent le même mendiant. Il s'agit de Matsutani, un Metsuke pour le shogun. Épisode 115 - Miyamoto Usagi et Shizu (une ninja du clan Nekko) aide le seigneur Awase à atteindre le Château du Nuage Rouge pour en prendre possession au nom du shogun. Épisode 116 - Murakami Gennosuke et Inukai refont route ensemble et sont à la recherche de Taniguchi, un individu dont la tête a été mise à prix pour une forte somme. Par hasard, Gennosuke se retrouve à prendre seul en charge Taniguchi et à faire connaissance avec lui. Saya (8 pages) - Le fourreau de l'épée d'Usagi heurte par mégarde celui d'un noble samouraï qui le prend comme un grave affront.
Dans le tome précédent, Stan Sakai avait conçu une histoire de grande ampleur se déroulant sur l'ensemble des épisodes. Après ce récit de grande envergure, il revient à une suite d'histoires plus courtes, mais tout aussi consistantes. Le lecteur se retrouve même surpris que le personnage principal apparaisse dans tous les épisodes à l'exception du dernier, car ce n'était pas le cas dans le tome précédent. Celui-ci commence par une histoire d'esprits comme l'auteur en réalise régulièrement. Il s'amuse aux dépens de Gennosuke, tout d'abord pour son manque de générosité chronique, puis pour sa défiance pas forcément bien placée. Il s'agit d'un épisode de détente dans lequel Stan Sakai joue sur le caractère renfrogné de Gennosuke, et dans lequel il prend plaisir à mettre en scène des duels entre lui et un individu qui pourrait bien être Usagi. Comme d'habitude, le lecteur admire la capacité de l'artiste à impliquer le lecteur avec des dessins en apparence simplistes et des personnages évoquant des animaux anthropomorphes. C'est à nouveau une preuve éclatante de la qualité de la direction d'acteurs, et de l'intelligence des plans de prise de vue qui donnent l'impression au lecteur de progresser sur un chemin au cœur de la forêt. C'est également un jugement de valeur sur le fait que la gentillesse ne coûte rien.
Avec les 2 épisodes suivants, Stan Sakai reprend un schéma classique dans les aventures d'Usagi : un nouveau personnage, un nouveau village, un individu abusant de sa position de force. Dans un premier temps, le lecteur est étonné que la saltimbanque ne soit pas Kitsune, mais il prend plaisir à découvrir cette nouvelle venue dans la série. Il découvre une femme forte, très capable de se défendre toute seule, elle aussi sensible aux souffrances de plus faible qu'elle. En quelques pages et quelques répliques, Stan Sakai a su donner une histoire personnelle à Sakura et à la rendre tragique et sympathique et à réserver une grosse surprise la concernant par a suite. Il réalise des séquences habituelles : prise de repas dans une auberge, cheminement dans la forêt. Il compose aussi des séquences inattendues et prenantes. Le lecteur aura rarement été aussi absorbé par une partie de dés en bandes dessinées. Il se retrouve impressionné par la gravité de Sakura maniant le cornet à dé. Il observe la tension monter alors que les 4 malandrins commencent à menacer Sakura sur le chemin, proférant des menaces à demi-mots, de la manière dont ils l'entourent, se préparant à l'agresser physiquement. Il sourit en voyant Usagi faire de son mieux pour la secourir. Cette histoire est une franche réussite. Encore une fois l'auteur intègre subrepticement un petit commentaire social, à la fois sur les femmes en tant que population fragile, mais aussi sur le réconfort qu'il y a à s'occuper de quelqu'un d'autre (Sakura prenant la responsabilité de Momo).
Dans l'épisode suivant, Stan Sakai revient à un ton plus humoristique avec le retour du mouchard. Visuellement parlant, il force la dose dans sa description, montrant un individu au visage toujours dans l'ombre du foulard qu'il porte sur sa tête, et toujours en train de courir, soit pressé de réaliser sa prochaine arnaque, soit en train de fuir un gogo dont il a abusé de la crédulité. Le lecteur sourit également devant la manière dont Gennosuke et Inukai sont dessinés quand ils commencent à échanger des noms d'oiseau, montrant un antagonisme des plus virils. L'histoire se déroule de manière linéaire vers une fin prévisible, mais l'auteur réussit quand même à insuffler un minimum de personnalité à l'individu dont la tête est mise à prix. De même les prises de bec entre Inukai et Gennosuke comportent une forme de commentaire sur l'attitude qui consiste à vouloir imposer sa vision en criant plus fort que l'autre, et sur le déroulement prévisible quand l'interlocuteur adopte la même stratégie.
L'histoire du mendiant croisant régulièrement la route d'Usagi est beaucoup moins habituelle. Stan Sakai met en scène un métier classique au sein des gouvernements, mais pratiqué de manière originale par Matsutani. Du coup, le lecteur prête plus d'attention aux images pour voir s'il ne s'y cache pas des indications quant à ce mystérieux mendiant. Il observe les habitants déambulant dans la rue d'un village. Il regarde les attitudes des clients dans l'auberge où Usagi prend son repas. Il détaille la position du mendiant dans la maison abandonnée où il passe la nuit avec Usagi dans la même pièce. Chacune de ces séquences attestent de la qualité de la narration visuelle de l'auteur qui laisse les images entretenir le mystère. L'exercice de ce métier incite le lecteur à se demander à quoi pouvait ressembler la vie d'un tel individu.
Avec l'épisode suivant, Stan Sakai raconte un récit de type chanbara, avec une dimension tragique. Il est possible de l'apprécier pour le périple d'un dignitaire devant à tout prix atteindre un château tout en sachant pertinemment que des ennemis ont tendu des embuscades le long de sa progression. Le lecteur prend alors plaisir à voir les différents gardes du corps deviser entre eux pour essayer d'anticiper les guets-apens, ainsi qu'à observer le déroulement des affrontements armés. Il peut aussi se laisser prendre par cette histoire de dignitaire contraint d'accomplir ce que lui impose son rang, incapable de se dérober aux contraintes du système. À nouveau, en une poignée de phrases, Sakai confère un minimum de personnalité à ce dignitaire, le rendant tangible pour le lecteur qui peut alors s'y projeter.
La dernière histoire reste dans un registre tragique. Une fois encore, Inukai et Gennosuke ne font qu'exercer leur métier de chasseur de primes. Mais cette fois-ci les circonstances, font que Gennosuke apprenne à connaître son gibier en parlant avec lui, en découvrant son histoire personnelle. Une fois de plus l'auteur montre que chaque individu est un être humain avec son histoire personnelle, ses valeurs et que les circonstances sont pour beaucoup dans la position où il se retrouve. Comme d'habitude, le lecteur apprécie le cheminement sur la route, les combats bien organisés. Il observe également les visages des personnages et leur langage corporel pour se faire une idée de leur état d'esprit, et de leurs états d'âme. Stan Sakai l'épate une fois de plus par les nuances qu'il sait faire apparaître dans ses dessins qui semblent pourtant si simples. La dernière histoire est plus basique car il s'agit pour Miyamoto Usagi de donner une leçon à un samouraï un peu arrogant.
Après une longue histoire dans le tome précédent, Stan Sakai revient à des histoires plus courtes. Il épate son lecteur par une variété de récits que rien ne semble en mesure de tarir, par des environnements souvent de même nature (forêt, chemin, auberge) mais jamais répétitifs, par des personnages d'apparence simple, mais d'une grande richesse émotionnelle et personnelle.