Ce tome contient les épisodes 199 à 209 de la série Uncanny X-Men (en abrégé UXM), ainsi que le numéro annuel 10, initialement parus en 1985/1986. Tous les scénarios sont de Chris Claremont. John Romita junior dessine les épisodes 199 & 200 (encrés par Dan Green), 202 & 203 (encrés par Al Williamson), et les épisodes 206 à 209 (encrés par Dan Green, sauf 209 par Philip Craig Russel). Rick Leonardi dessine l'épisode 201, encré par Whilce Portacio. June Brigman dessine l'épisode 204 (encré par Whilce Portacio). Barry Windsor Smith dessine, encre et met en couleurs l'épisode 205. Le numéro annuel est dessiné par Art Adams et encré par Terry Austin.


Épisode 199 - Rachel Summers se rend dans la demeure d'Elaine et John Grey pour se recueillir devant le globe holographique à la mémoire de Jean Grey, cadeau des Shi'ar. Épisode 200 - Erik Lehnsherr (Magneto) accepte de répondre de ses crimes devant une cour de justice internationale, se réunissant dans le Palais de Justice à Paris en France. Épisode 201 - Storm et Cyclops s'affrontent pour savoir qui sera le chef des X-Men. Épisodes 202 & 203 - Rachel Summers affronte le Beyonder (dans le cadre de l'omni-crossover Secret Wars II) qui lui a cédé assez de pouvoirs pour qu'elle puisse l'éliminer. Épisode 204 - Et pendant ce temps là, Nightcrawler sauve une demoiselle en péril (Judith Rassendyl) dans le parc d'attractions mortelles d'Arcade. Épisode 205 - Wolverine affronte Lady Deathstrike sous la neige, avec l'aide de Kathie Power, la très jeune superhéroïne Energizer membre de Power Pack. Épisodes 206 à 209 - Après avoir affronté pour la première fois Freedom Force à San Francisco (avec l'aide de Jessica Drew), les X-Men reviennent à New York et affronte la sentinelle Nimrod et le club Hellfire. Numéro annuel 10 - Les X-Men régressent à un âge infantile du fait des agissements de Mojo ; les New Mutants leur viennent en aide.


Voilà un tome copieux, 320 pages de bandes dessinées (plus des couvertures annexes de rééditions dont Cyclops dessiné par Dave Sim, le créateur de Cerebus), couvrant 11 épisodes et 1 annuel, soit presqu'un an de la série X-Men sur laquelle Chris Claremont s'est installé en 1975 (à partir de l'épisode 94) et qu'il quittera en 1991. Avec cette épaisse tranche de continuité, le lecteur observe plusieurs des caractéristiques propres à cet auteur.


La lecture en recueil produit une impression de récit décousu qui saute d'une intrigue à l'autre, et d'un personnage à l'autre, sans parler de la participation au crossover "Secret Wars II". Alors que l'épisode 199 est consacré à Rachel Summers et ses difficultés d'intégration à une époque qui n'est pas la sienne, dans une réalité qui n'est pas la sienne (elle vient du futur de la Terre 811, et a abouti dans le présent de la Terre 616), l'épisode suivant suit le procès de Magneto. On passe par un épisode consacré à Nightcrawler en solo, un autre à Wolverine en solo, pour revenir à Rachel Summers. Les intrigues secondaires entremêlées s'étirent sans espoir de résolution que ce soit le sort de Rachel Summers apparue pour la première fois dans Days of future past, arrivée dans le présent dans New Mutants classic 3 et sortie de la série UXM pour réapparaître dans Excalibur. Claremont conçoit ses séries comme un tout, charge au lecteur de suivre les personnages de l'une à l'autre, et prendre son mal en patience. Dans le même ordre d'idée, ce tome comprend l'accouchement de Madelyne Prior qui donne naissance à un petit Nathan. Il faudra attendre plusieurs mois pour connaître son prénom et son devenir (sans parler du couple formé par les parents). Ne parlons pas d'Amanda Sefton, ou du devenir de Spiral.


Ce recueil fait également prendre conscience que Chris Claremont envisage sa narration sur le long terme, tirant pleinement profit de son caractère périodique et sans fin. Pour lui, il n'y a pas de petits personnages, tous sont susceptibles d'avoir une scène ou un épisode dans lequel ils puissent briller. Cela va des X-Men de premier plan, aux personnages récupérés dans d'autres séries, comme David Ishima, Lindsay McCabe, et Sabrina Morrel en provenance de la série "Spider Woman", à Sir James Jasper (en provenance de Siege of Camelot, les épisodes de Captain Britain écrits par Alan Moore) et Betsy Braddock (sœur de Captain Britain), en passant par les Starjammers et Lilandra Neramani. Pour le lecteur régulier, il s'immerge dans un univers fictif complexe et très développé, avec des personnages de tous horizons, pour un imaginaire très riche. Pour un lecteur occasionnel, il bénéficie du mode de narration qui rappelle dans chaque épisode qui est qui, ce qui attise sa curiosité.


Ces épisodes attestent aussi de la volonté de Claremont de ne pas s'enfermer dans un statu quo confortable, dans un immobilisme sécurisant. Il fait évoluer ses personnages, soit rapidement (Rachel Summers), soit petit à petit au fil des épreuves. Il fait évoluer la constitution de l'équipe en intégrant des personnages inattendus : Longshot ou Betsy Braddock. Il bouscule le statu quo en faisant passer une équipe de supercriminels, au statut d'agents gouvernementaux en échange de pardon, à condition qu'ils acceptent un code de conduite moral (pas de meurtre, protéger les civils avant tout, etc.). Bien sûr certains changements et certaines variations sont plus réussis que d'autres. Il n'est pas sûr que l'univers des X-Men avait besoin d'un nouveau modèle de Sentinel (Nimrod) et qu'en prime le combat contre ce dernier se termine à nouveau en queue de poisson.


La narration au long cours offre également la possibilité à Claremont de creuser ses thèmes de prédilection, de les aborder sous des angles différents. Les mutants constituent une métaphore de l'altérité et des minorités dans la société. Avec le procès de Magneto, Claremont aborde la question sous un nouvel angle, aussi pertinent que sophistiqué. Il mêle racisme contre les mutants, avec crimes de guerre, et héritage de la Shoah, sans oublier les convictions religieuses des personnages (à commencer par Kitty Pride). Au lieu de polariser son récit sur un discours moralisateur, Claremont fait l'effort de faire ressortir la complexité de la situation, dans un imbroglio international où plusieurs factions ont raison, sans qu'il soit pourtant possible de cautionner aveuglément le recours à la violence. Il augmente la dimension de la réflexion en montrant la volonté des personnages de supporter la responsabilité des conséquences des actes qu'ils ont commis. Enfin il s'avère particulièrement malin puisqu'il se sert d'un point de continuité obscur (Magneto revenu au stade de nourrisson dans Essential Defenders 2) pour rendre son cas plus complexe. Il peut même opposer le message de tolérance à la réalité des actions de Wolverine pour en faire ressortir leurs contradictions.


Enfin Claremont profite de l'assurance de raconter son histoire sur des mois, pour aussi réaliser des histoires complètes en elles mêmes comme celle consacrée à Nightcrawler, ou celle à Wolverine. Pour le lecteur achetant ces fascicules mensuellement, cela pouvait s'avérer frustrant de voir que la suite de l'histoire qu'il attendait était ainsi différée. Comme il en avait pris l'habitude sur les 2 dernières années, Claremont se sert du numéro annuel pour raconter une aventure plus légère, plus drôle.


John Romita junior (en abrégé JRjr) illustre 8 épisodes, dans un style vivant et efficace, réussissant à caser tous les personnages sans jamais donner l'impression de cases surpeuplées. Dan Green réalise l'encrage (et parfois la finition des dessins) en privilégiant les textures et la lisibilité des expressions, plutôt qu'un peaufinage pour faire joli. Par rapport à des comics plus récents, la densité et l'omniprésence des décors est impressionnante, ce qui participe à un bon niveau d'immersion du lecteur dans l'environnement des personnages. JRjr teste parfois d'autres modes de rendus pour des éléments spécifiques. Ainsi il choisit une apparence dépouillée pour rendre compte de la puissance de Rachel Summers investie du pouvoir du Phénix. L'encrage d'Al Williamson est plus fin, plus travaillé ; l'encrage de Russell joue plus sur le détourage des formes. Par comparaison l'épisode dessiné par Leonardi est plus quelconque, plus maniéré, et celui dessiné par Brigman franchement fade.


En termes de spectacle visuel, Art Adams donne une apparence mignonne à croquer à ces versions enfantines des X-Men. Malgré le scénario un peu léger, impossible de résister à la fraîcheur du spectacle, aux nouveaux costumes, et à ces enfants mutins. Il avait déjà illustré la deuxième partie de The Asgardian wars. Le sommet graphique est atteint avec l'épisode 205, et les illustrations exquises de Barry Windsor Smith. Il réussit à transformer cet épisode de combat en un ballet féerique sous la neige, légèrement claustrophobe du fait du manque de visibilité, la sauvagerie de Wolverine ressortant dans toute sa noblesse.


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Si vous êtes fans des X-Men, ce recueil recèle des pépites et une étonnante richesse (tant pour les personnages que pour les thèmes), ainsi que des moments clefs de l'histoire de l'équipe (Magneto changeant de camp, la naissance de Nathan, le retour de la force Phénix...), avec des images un peu datées pour les couleurs, mais très vivantes. Il faut le temps de se faire à la narration appuyée de Claremont qui insuffle un rythme de lecture un peu ralenti, le temps de tout lire, mais très attaché aux personnages. Si vous cherchez un tome pour découvrir cette équipe, il est possible que vous soyez séduit par la richesse de cet univers, mais aussi décontenancé par cette narration qui papillonne, et qui fait appel à de nombreux éléments de continuité. Les épisodes suivantes (210 à 214) sont incorporés dans Mutant massacre.

Presence
8
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le 18 avr. 2020

Critique lue 39 fois

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