Un poids sur la confiance (de soi)
De Bent Hamer, on se souvient du surprenant « Factotum » en 2005 avec un inoubliable Matt Dillon en Bukkoski plus vrai que nature. Il nous revient cette année avec un film que l’on peut qualifier sans trop s’avancer de totalement surprenant et subtilement mise en scène. Avec le pitch le moins glamour qui soit, une conférence internationale autour du poids réel du kilo, il vient cueillir le spectateur là où il ne l’attend pas. Car bien évidemment, l’intrigue ne tourne pas autour de l’étalon précieusement gardé depuis 1875 au BIPM (Bureau International de Poids et Mesure) mais plus précisément autour de Marie, norvégienne (détentrice » du prototype de son pays) et de ce qui sera son éveil à la vie. Plus précisément de la prise de conscience que son existence de scientifique, jusque là géométriquement impersonnelle (sublime travail d’image dans ce sens d’ailleurs) totalement lisse, prendra une tournure inattendue grâce à la rencontre de PI, un professeur voltairien et quelque peu décalé. Cette histoire d’amour en filigrane prendra des proportions gigantesques et viendra l’ébranler. Il est difficile de retranscrire ce film sans en déprécier sa valeur. Visuellement parlant d’abord avec une lumière, un jeu de cadres originaux (on pense à Tati ou Greenaway) et des trompe l’œil somptueux. Scénaristiquement ensuite, car ici le récit est pondéré, pesé et réfléchi et trouve un juste équilibre autant dans sa partie scientifique, que dans les relations humaines. Et surtout on s’y amuse beaucoup. Entre les situations cocasses, le jeu de pistes du réalisateur (l’image parle autant que les mots), des agencements optiques magnifiques (de nombreuses références picturales contemporaines parsèment l’œuvre), l’esprit est en alerte et se réjouit de tant d’intelligence. Marie est incarnée par une Ane Dahl Torp inspirée, dont la beauté s’éveille au fur et à mesure et Pi, notre scientifique grand amateur (entre autre) de chants de chardonnerets, est campé par un Laurent Stocker qui trouve (depuis « Ensemble c’est tout ») un rôle à la hauteur de son grand talent de comédien. Brillant et fascinant « 1001 grammes » est sans hésiter la bonne surprise de ce début d’année cinématographique un peu morne et de loin le plus original.