Durant pareille journée, y'a-t-il un thème plus d'actualité que la force de conviction, le courage et la détermination? Car voyez-vous, pour se sortir d'un tel état de crise, il faut, je pense, garder son sang-froid et la tête haute, et courir, courir, et courir vers notre destin, se soutenant les uns les autres. En bref, il faut faire comme cet homme là, ce Solomon Northup, s'affranchir de ses chaînes, et changer le cours des choses.
Mais c'était pour la minute d'actualité. Parlons à présent du film. Aussi vrai que ce que nous venons de vivre fut une réelle infâmie, "12 Years a Slave" est un grand film. Un vrai chef-d'oeuvre, même, le genre de film qui marque à vie, et que l'on a réellement du mal à sortir de sa tête. Concrètement, c'était la rencontre que j'attendais le plus : deux de mes acteurs favoris jouant dans un même film, et même si Cumberbatch et Fassbender ne se croisent pas, au moins jouent-ils dans une oeuvre commune.
Dès lors que je vous ai dit cela, une question se pose : comment ai-je trouvé leur interprétation? Grandiose? A moindres mots grandes idées, oui. Carrément, même. Lequel ai-je préféré? Cela, je ne pourrai vous le dire. Fassbender? Peut-être. Son interprétation était assez puissante pour que je l'apprécie particulièrement. Cumberbatch? De même.
Voyez-vous, le problème vient du fait que leurs rôles sont tellement différents, qu'ils en viennent irrémédiablement à se compléter. Je ne peux préférer l'un à l'autre, ou l'autre à l'un; tous deux sont tellement bons qu'ils se hissent au même niveau, un niveau presque irréprochable. En fait, je ne vois pas ce que je pourrai leur reprocher. Comme d'habitude, ai-je envie de dire.
Et justement, le talent n du cinéaste est de les mettre à complet contre-emploi; Cumberbatch fait des étincelles en gentil, en homme bon, (
souvent caractérisé par ses rôles de méchant, "Star Trek", ou de sociopathe, "Sherlock" et Doctor Strange), changeant sa carrière d'angle de vue, et Fassbender, habituellement le héros de ses films, en méchant, en sadique. Le résultat donné est impressionnant de maîtrise; en un mot, c'est prodigieux.
Et puis, que vaut donc l'acteur principal, celui qui interprète le rôle de Solomon? Lui aussi est grandiose. C'est incroyable de voir une telle puissance dans le jeu, prouvant, par delà même son talent, qu'il n'a ni volé sa réputation, ni ses récompenses. Je pense que le choix n'aurait pu être meilleur; il incarne son rôle à la perfection, et donne vie à cet homme défunt. En gros, il est à la fois intense et engagé; il apparaît évident qu'il prend son rôle à coeur, et c'est, je pense, l'une des principales raisons d'une telle réussite.
Vient s'y ajouter la mise en scène de Steve McQueen II (je ne m'y ferai jamais); prodigieuse, magnifique, elle s'impose comme l'une des plus justes de son année. Pour faire simple, ce n'est que du bonheur. Pleine d'effets de style de toutes sortes, elle parvient à sublimer l'instant présent, rendant les choses, le monde, d'une rare élégance. Voyez-vous, je pense que cela est principalement dû au rythme de l'oeuvre, mais également aux décors, et à leur manière de les montrer.
Car comme je l'écrivais dans ma critique de "Planète Interdite", de nos jours, l'on a généralement du mal à donner de la substance aux décors. Mais ce constat, mûrement pensé, ne s'applique pas à ce métrage ci. Car McQueen sait rendre les décors uniques et puissants; ils font partie de l'oeuvre, et lui offrent une force nouvelle que beaucoup ne possèdent pas.
De plus, l'écriture s'avère, elle aussi, fabuleuse. Le résultat est donc à la fois saisissant, horrible et jouissif; voir les badguys de l'histoire être punis, cela ne peut que nous réconforter. D'autant plus que c'est une histoire vraie, rendant le tout encore plus humain, touchant; merde, le mec a vraiment vécu ça, quoi ! Impressionnant. Une expérience marquante, une véritable leçon de vie. Et en ces temps de crise, je pense que l'on devrait tous suivre l'exemple de Northup, et nous montrer courageux et forts devant l'adversité. Bonne soirée.
http://avion.blogs.allocine.fr/2015/11/prayforparis-12-years-a-slave-2012.html