Takashi Miike est un auteur controversé, versatile et difficile à suivre, alors quand il réussit à se canaliser pour livrer une claque comme 13 Assassins, ça fait vraiment plaisir. Pour la première fois, Miike a l'humilité de s'effacer derrière son récit, en mettant en sourdine son goût pour le n'importe quoi. Et c'est salutaire tant le film est puissant, contrôlé, emplie d'une colère dévastatrice.
Remake du film de Eichi Kudo, Miike sait s'appuyer sur son ainé, ainsi que sur le cinéma de Kurosawa, référence incontournable, pour dépeindre le combat désespéré de samouraïs pétris de valeurs morales et se sachant condamnés à devenir obsolètes.
Ce groupe isolé de samouraïs, debout devant une autorité qu'ils ont le courage de clamer comme injuste, savoure la perspective de partir dans un dernier baroud d'honneur. Le leader Shinzaemon l'explique très bien, lorsqu'il saisit le sadisme de leur adversaire et la nécessité d'agir, il sourit et tremble d'excitation.
Cette opposition est un pari fou, leurs adversaires n'étant plus une cinquantaine comme dans le film originel, mais carrément deux-cent, rendant l'affrontement complètement dingue. Les samouraïs cherchent à pallier leur insuffisance en nombres par la roublardise et l'inventivité, en s'appuyant sur l'avantage du terrain et leur furie suicidaire.
Les combats sont acharnés et variés, explosions, coups de putes, samouraïs combattant avec deux sabres, sidekick (proche du Mugen de Samurai Champloo) se battant à coup de gnons dans la gueule, bref n'en jetez plus!
Ce climax final marque les esprits, car il est juste anthologique, d'une violence radicale et d'une générosité telle qu'elle relève de l'inédit.
En somme, 13 Assassins est vraiment une bombe.
De l'histoire du sobre film de Kudo, Miike conserve la rage et les samouraïs archétypaux, fantômes rustres d'une époque révolue, et il rajoute des débordements de violence gargantuesques, si édifiants que le film acquiert une dimension de plaisir cinématographique total.
Car, au final, cet inspiré chambara (film de sabre japonais) qu'est 13 Assassins laisse le spectateur dans le même état paradoxal que le jeune Shinrokuro: même exsangue, traumatisé devant tant de violences, impossible de réprimer un putain de sourire béat de pur satisfaction.
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