Ridley Scott verse dans l'épopée autant que dans le portrait intimiste d'un aventurier idéaliste auquel Gégé Depardieu a apporté sa stature et sa sensibilité, habité par son rêve, même si je crois qu'il n'était pas vraiment l'homme du rôle ; en effet, Colomb fut un aventurier visionnaire peut-être, mais sa personnalité dont on ne sait s'il était Gênois ou Espagnol, est complexe, ambiguë, contestable, il est parvenu à ses fins par hasard, voire par erreur, ne sachant pas naviguer ni vraiment lire une carte, seulement motivé par sa cupidité, et il n'a pas découvert l'Amérique mais les Bahamas, c'est la première terre sur laquelle il a abordé le 14 octobre 1492, île qu'il baptisera aussitôt San Salvador.
J'aurais aimé que Ridley aille plus loin que ce portrait trop flatteur et trop consensuel, qu'il nous dise toute la vérité sur Colomb, qu'il prenne des risques, mais ça n'aurait pas été commercial, aussi comme le fit John Ford à propos de Liberty Valance où il filma la légende plus belle que la réalité, Ridley a filmé la légende, sans trop de risques mais avec quelques lourdeurs et pas mal de longueurs qui affaiblissent le film.
Toute la première partie sur le projet chimérique, les entrevues avec la reine Isabelle la Catholique, les préparatifs, le voyage... tout ceci est à peu près réussi, mais la seconde partie une fois les caravelles débarquées sur cette terre nouvelle, n'est pas à la hauteur de la première. L'honnêteté historique qui doit de nos jours être de rigueur, ne montre pas toujours de façon claire le rôle des Espagnols vis à vis des Indiens victimes de mauvais traitements et d'exactions, il y a aussi beaucoup de flottement.
On a tendance à ne retenir de cette superproduction que le célébrissime "Conquest of Paradise" de Vangelis, c'est vrai que ce morceau et la partition en général ont beaucoup fait pour le film, même si parfois la musique devient gênante, spécialement dans la scène où Colomb pose le pied sur cette terre nouvelle en s'émerveillant du silence, alors que cette belle scène est trouée par la musique tonitruante.
Mais c'est peut-être un peu injuste de considérer le film comme entièrement raté. Certes, il n'est pas parfait, et s'il ne peut éviter quelques longueurs, il faut reconnaître du mérite à Ridley Scott qui s'applique toujours dans ses films. Ici, il a rassemblé une distribution internationale avec de grands acteurs pour une fresque de grande ampleur, aux belles images, et pleine d'intensité, sublimée par la partition de Vangelis. Tout a été fait pour que ce soit le film énénement de 1992, il est même sorti non pas un mercredi mais un lundi, le 12 octobre 1992 pour coller jour pour jour aux 500 ans du débarquement de la Santa Maria, de la Nina et de la Pinta sur les terres de ce qu'on nommera le Nouveau Monde. On peut donc se hasarder à ses risques et périls dans ce film si on n'a pas peur des 2h40.

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le 10 mai 2020

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Ugly

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