On va passer le traitement purement cinématographique de ce film. Il est mauvais, techniquement et scénaristiquement. C’est un divertissement efficace, puisqu’il est quand même parvenu à créer des émules à sa sortie, mais sa réalisation catastrophique se passe de commentaires.
En revanche, j’en veux personnellement à ce film d’avoir ouvert la voie à l’une des plus terribles maladies de ce début de siècle, un mal qui gangrène nos sociétés depuis plus de 15 ans, une véritable menace pour la stabilité de l’espèce humaine toute entière : le complotisme.
Roland Emmerich, avec 2012, a achevé d’ancrer une idée particulièrement toxique dans la tête de son public, un public majoritairement composé d’adolescents en pleins questionnements métaphysiques. Il a insufflé à ses spectateurs le postulat alléchant d’une conspiration généralisée et permanente des élites, qui détiendraient des informations capitales top secrètes et qui ne manqueraient jamais une occasion de préparer leur survie dans le dos du reste de la population.
Il a installé la pensée d’une menace perpétuelle, qui pèserait sur une espèce humaine trop sédatée par les médias pour en prendre conscience.
Il a sapé la confiance des gens envers un système qu’ils se sont doucement mis à considérer comme foncièrement mauvais, et désespérément mythomane.
Évidemment, le complotisme n’a pas attendu 2012 ou Independance Day pour prendre corps ; ce phénomène est certainement aussi vieux que l’Homme, et il dépend de ressorts intellectuels profonds dont nous n’avons même pas conscience. Mais si ce complotisme était le fait d’une poignée d’illuminés avant les années 2000, il est devenu un sport grand public à la sortie de ce film.
Emmerich a donc contribué à populariser ce complotisme de bas étage qui a donné naissance, en quelques années seulement, à la théorie du calendrier Maya, aux chemtrails, aux reptiliens, à la pensée antivax. Et pour ça, l’œil naïvement indulgent que je portais à ce sympathique navet s’est peu à peu mué en un regard grave et accusateur, pour tout le mal qu’il a pu faire à ce monde, qui souffre aujourd’hui terriblement des conséquences de ce mode de pensée délirant qu’est le complotisme à la sauce 2012.