[cette critique contient du spoil]
Un homme nu dans un lit d’hôpital, immobile, ligoté par les innombrables fils auquel il est branché. 28 jours avant, des singes échappés d’un laboratoire ont propagé la rage. 28 jours après, il se réveille, Jim (Cillian Murphy) fait face à la désolation. Le temps semble comme arrêté, les téléphones ne sonnent plus, les combinés pendent attachés par leurs câbles, les rues de Londres sont désertes, plus une voiture ne passe, papiers et détritus sont les dernières traces d’une humanité portée disparue.
Si au premier abord, 28 jours plus tard ressemble à n’importe quel récit sur la figure du zombie, il s’en démarque, porté par la mise en scène de Danny Boyle. Tant film de mort-vivant que film de contagion, la figure du revenant est troquée par celle de l’infecté, la menace ne tient plus dans la masse rampante, mais dans l’assaut imprévisible. L’infecté n’est pas groupe mais individu, il ne se constitue pas en horde, assouvit ses pulsions dans sa rapidité. La critique du consumérisme émise habituellement par le film de zombie, mute ici en critique de l’individualisme au travers de l’infecté. On échange la foule lobotomisée marchant mains devants pour l’être laissant libre cours à ses désirs pulsionnels. Face à cela, la communauté se présente comme seule solution. La survie individuelle (alliance utilitaire qui se termine lorsqu’un partenaire ralentit l’autre) laisse place à la création d’une structure familiale comme moyen de retour à la civilisation. Elle trouve son point d’orgue lors des achats au supermarché, où le groupe se voit retourner aux pratiques sociales et familiales. Frank incarne le beau-père qui partage son expérience et conseille l’alcool qu’il faut choisir à Jim, qui incarne le gendre ignorant. Séléna, quant à elle, joue le rôle de la belle-mère auprès d’Hannah, qu’elle gâte de chocolat, tandis que se développe une complicité féminine entre les deux. Cette quête de civilisation est aussi celle du groupe de militaire et la motivation de leur sordide projet : retrouver leur humanité grâce au contact charnel et sexuel par le viol des survivantes, soit retrouver leur humanité par la déshumanisation de l’autre. Paradoxe qui place les soldats sur le même pied que les infectés. Pourtant, c’est bien Jim qui agit comme les monstres, en les traquant dans leur base aménagée, devenue un véritable manoir des horreurs. Il devient chasseur et les hommes de l’armée ses proies, dans une séquence où il nous rappelle le Roy Baty de Blade Runner. Si la violence déclenche la perte de la société civilisée, c’est cette même violence qui sauve l’humain de la sauvagerie.
La photographie d’Anthony Dod Mantle, avec son image (volontairement) mal exposée et de faible qualité, offre un voyage crépusculaire à l’orée de la chute du monde, où nulle beauté ne subsiste, et où la crasse et la saleté des cadavres règnent. La musique de John Murphy, quant à elle, confère tension et angoisse à ce périple apocalyptique.