Three billboards est un film plus fin qu'il n'y parait au premier abord, et qu'il est en fait difficile de véritablement classer. Malgré tous les flics qu'on peut y voir, ce n'est définitivement pas un film policier, en tout cas pas au sens classique du terme. Ce n'est pas non plus, malgré la présence de l'excellente (et glaçante dans son rôle) Frances McDormand, une vague resucée des frères Coen. Les trois panneaux ne tiennent en définitive pas une place si importante dans le scénario, même s'ils jalonnent le film de quelques scènes particulièrement fortes. Et la vengeance, si elle est présente dans le film, ne s'impose pas comme son thème principal. Alors, quoi me direz vous ?
Eh bien, sans doute une peinture de l'Amérique profonde d'aujourd'hui, violente, individualiste et sans concession pour les faibles, mais qui cherche d'une certaine manière à s'accrocher à ses valeurs, certaines étant plus ou moins contestables d'ailleurs. Et, en utilisant la toile de fond d'un fait divers sordide, Martin McDonagh nous sert une chronique - pleine d'un humour décapant mais aussi primesautier - d'une petite ville américaine, avec ses flics parfois racistes, ses travailleurs précaires, ses grosses bagnoles, ses armes, ses bars country, ses médias...Le tout avec des personnages, sans doute ploucs pour certains d'eux, mais jamais caricaturaux, profondément humains en tout cas. Souvent inattendus et jamais figés dans leurs postures, quoiqu'il en soit. Et l'on sent même par moment poindre une certaine tendresse du réalisateur pour ses personnages...
Le point fort du film est par ailleurs sans aucun doute ses dialogues, excellents dans la plupart des scènes et qui sont souvent, très souvent, franchement drôles. La bande son, à base de country bien sûr mais pas uniquement, est solide. Le scénario est intelligent, bien maitrisé et on ne tombe jamais dans le mélo hollywoodien. La fin ouverte permet d'éviter l'écueil d'un happy end larmoyant, dont à vrai dire on ne voit guère comment il aurait pu survenir au vu ce qui se passe auparavant. Et je ne suis pas loin de penser que, d'une certaine manière, McDonagh nous dit quelque chose : et toi, alors, que penses-tu qu'il va advenir demain de ce grand pays ?