Très loin de réaliser un énième biopic traditionnel, Emily Atef opte pour une approche beaucoup intimiste, personnelle, se concentrant uniquement sur les trois jours de « thérapie » suivis par la comédienne en 1981, séjour dont elle « profita » pour donner un entretien au journal allemande Stern, également accompagnée pour l'occasion par son ami d'enfance. Dans un premier temps, j'avoue avoir été vraiment séduit.


Pas d'artifices mais sobriété, dignité : tout en décrivant les blessures profondes et la détresse de la comédienne, le regard presque amoureux qu'elle lui porte, plein de compassion, permet de trouver un ton juste, fort, auquel vient parfaitement s'intégrer l'interview,


dur, tranchant, volontiers provocateur,


mené par ce reporter ambigu et a priori un peu caricatural, impression toutefois atténuée dans les dernières minutes de l'œuvre.


On sent une recherche de liberté, chez la réalisatrice comme son héroïne, notamment durant cette « échappée » où Romy


fait la rencontre de gens « normaux », dont certains admirateurs :


joli (et un peu long) moment de cinéma. C'est d'ailleurs le « seul » reproche que je fais au film : cette démarche de raconter au plus près, de façon la plus réaliste possible ce moment de la vie de l'icône, dans ce qu'elle a la fois de plus beau et de plus faillible, loin du glamour et des paillettes, est on ne peut plus louable.


Mais sur 105 minutes, le temps est quand même un peu long. Difficile d'éviter une certaine lassitude, une impression de répétition ô combien logique au vu de la situation de l'héroïne... L'œuvre gagne en authenticité ce qu'elle perd en lyrisme, en plaisir, sans pour autant en être dénué. Ces scènes de complicité avec « son » photographe où celle-ci se montre radieuse, sont notamment de beaux instants, comme celle avec son amie Hilde (l'excellente (et très jolie, quoi qu'en dise le journaliste!!) Birgit Minichmayr).


« Trois jours à Quiberon » peut surtout compter sur deux qualités majeures : son magnifique noir et blanc mat, aussi brut que lumineux, et surtout la brillante prestation de Marie Baümer, Romy Schneider à la fois radieuse, brisée, incontrôlable, profondément touchante, sans jamais être dans le mimétisme, si ce n'est à travers ce merveilleux sourire auquel aucun homme ne peut résister. Du cinéma non sans exigence, se complaisant légèrement dans sa dimension « film d'auteur » au point d'en être légèrement ennuyeux, mais un faux biopic très loin des codes et portraits souvent aseptisés sur leur vedette : cultiver sa différence, surtout à travers une telle icône, cela mérite d'être salué.

Caine78
6
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Les meilleurs films de 2018 et Films en noir et blanc après les années 60

Créée

le 26 mai 2020

Critique lue 137 fois

1 j'aime

2 commentaires

Caine78

Écrit par

Critique lue 137 fois

1
2

D'autres avis sur 3 jours à Quiberon

3 jours à Quiberon
Fritz_Langueur
8

Le Stern et la sterne

Premier plan. Une femme lambda, de dos, regarde la mer, elle semble impassible, inerte, presque sans vie. On pourrait croire à du Sautet. Puis la caméra se rapproche cette femme se tourne vers elle...

le 27 juin 2018

8 j'aime

4

3 jours à Quiberon
ChristineDeschamps
6

Critique de 3 jours à Quiberon par Christine Deschamps

J'ai un peu eu devant ce film la même impression légèrement frustrante que devant Django, sur la traversée de la guerre par un guitariste tzigane refusant de se sentir concerné par le conflit. Je...

le 1 mai 2019

5 j'aime

3 jours à Quiberon
Cinephile-doux
8

Tous les chagrins mènent à Romy

Depuis longtemps, on faisait remarquer à Maria Bäumer sa ressemblance frappante avec Romy Schneider, l'incitant à l'incarner à l'écran. Mais depuis longtemps, l'actrice allemande refusait, de peur de...

le 15 juin 2018

5 j'aime

4

Du même critique

Enquête sur un scandale d'État
Caine78
2

Enquête sur un scandale cinématographique ?

Thierry de Peretti est un réalisateur doté d'une bonne réputation, notamment grâce à « Une vie violente », particulièrement apprécié à sa sortie. J'y allais donc plutôt confiant, d'autant que le...

le 20 août 2022

32 j'aime

8

Mourir peut attendre
Caine78
4

Attente meurtri(ère)

Cinq ans d'attente, avant que la crise sanitaire prolonge d'une nouvelle année et demie la sortie de ce 25ème opus, accentuant une attente déjà immense due, bien sûr, à la dernière de Daniel Craig...

le 7 nov. 2021

29 j'aime

31

L'Origine du monde
Caine78
3

L'Origine du malaise

Je le sentais bien, pourtant. Même si je n'avais pas aimé « Momo », adapté du même Sébastien Thiéry, cela avait l'air à la fois provocateur et percutant, graveleux et incisif, original et décalé,...

le 25 sept. 2021

25 j'aime