Qu’est-ce que l’amour ? Il y a tant de films qui tournent autour sans jamais vraiment l’aborder. Comme un amoureux transit, ces films-là n’osent jamais franchir le pas, et restent dans l’évocation de purs fantasmes irréels : le « je t’aime, moi non plus », flottement faussement incertain de l’union de deux êtres se concluant forcément par une stabilité éternelle de leur amour. C’est parfois réussi, mais reste toujours superficiel. Ces films ont au moins le mérite de nous faire rêver sans trop se prendre la tête. « (500) jours ensemble », lui, peut se targuer d’aborder l’amour avec bien plus de maturité : « this is not a love story ». Et paradoxalement, il n’en est que d’autant plus réjouissant.


Le problème, c’est que le fantasme d’un amour obligatoirement partagé et éternel est souvent rattrapé par la dure réalité. Quand c’est non, c’est non. Et quand c’est oui, youpi ! (Et pourvu que ça dure). Ce décalage entre l’idéal amoureux de Tom et la réalité est vécu par chacun d’entre nous. Il n’y a rien de plus projecteur que le sentiment amoureux, d’où un perpétuel manque de recul. C’est le sujet principal du film, qui essaye simplement de nous ouvrir les yeux : « L’amour, c’est décevant ! Il y en a un sur deux qui n’est jamais heureux ». Et cela tout en gardant un élan d’optimisme propre aux comédies romantiques.


Le plus étonnant, c’est que Marc Webb parvient à concrétiser ses intentions avec une pertinence rare. Rien que la scène du split-screen de l’anniversaire de Summer, nous laissant comparer ce qu’espérait Tom et ce qu’il s’est réellement passé est d’une maîtrise sans conteste. Le réalisateur appuie son propos avec un jeu des apparences constant (de l’hilarante séquence à Ikea à l’évocation détournée des souvenirs de Tom, jusqu’à son job de création de carte postale illustrée, les exemples sont nombreux) qui ne tourne pourtant jamais en rond. Et ce grâce à une narration décloisonnée, chaotique à l’image de l’esprit de Tom lors de sa rupture, laissant toujours le spectateur dans le doute, l’espérance d’une réconciliation définitive entre Tom et Summer. Quant à l’élan enthousiasmant et salvateur qui rythme le film avec grandiose, c’est en grande partie la bande-son qui le porte. Rarement des standards musicaux n’ont été aussi bien intégrés, des Smiths à Carla Bruni.


Au fond, les amours d’une vie peuvent facilement se découper en quatre saisons.


Au printemps, on bourgeonne, on papillonne (avec plus ou moins de succès, et plus ou moins de passion). Platon appelle cela l’Eros vulgaire. Pas souvent la période la plus glorieuse, en général.


Puis vient l’été amoureux, celui de la relation décisive, exaltante, essentielle. On la voit toujours comme l’ultime amour de notre vie, celui qui va nous suivre jusqu’à la mort. Mais l’été peut aussi avoir son lot d’intempéries, la rupture éventuelle n’en est que plus douloureuse, Tom peut en témoigner.


Et alors qu’il s’en remet tant bien que mal, voici venir l’automne. Plus réfléchie, plus expérimentée, la nouvelle relation en devient durable, contre toute attente. L’Eros céleste, selon Platon. Serait-ce là Ithaque, la fin du voyage ?


Pas forcément, car l’hiver peut refroidir les ardeurs premières, les cristalliser. Le feu de cheminée pourrait-il alors définitivement s’éteindre, ne laissant que les cendres d’une vie passée ? En amour, rien n’est gravé dans le marbre, mais tout l’est dans les mémoires de chacun. Et ce n’est qu’à la fin de notre vie qu’on pourra distinguer ces quatre saisons, et juger laquelle aura été la plus délectable.


Ma critique de "The Amazing Spider-Man 2" :
http://www.senscritique.com/film/The_Amazing_Spider_Man_Le_Destin_d_un_heros/critique/37484033

Créée

le 3 oct. 2015

Critique lue 403 fois

14 j'aime

3 commentaires

Marius Jouanny

Écrit par

Critique lue 403 fois

14
3

D'autres avis sur (500) jours ensemble

(500) jours ensemble
artificier
8

Bitch.

Ce film est dur. Très dur. Il passera comme une histoire d'amour banale pour certains mais si vous avez vécu la même chose une fois dans votre vie, il vous rappellera de très mauvais souvenirs. Une...

le 14 mai 2010

132 j'aime

7

(500) jours ensemble
Hypérion
7

Winter is coming

Alors là, je n'aurais pas cru me faire avoir par ce film, en ressortir aussi horripilé que piégé, au final forcé d'admettre sa réussite. Horripilé parce que ça enchaîne tous les poncifs du film...

le 10 mai 2013

108 j'aime

14

(500) jours ensemble
Torpenn
6

Romance inachevée

C’est fou comme la qualité du film a l’air de changer avec l’âge du spectateur… Adulée par mes castors juniors préférés qui ont l’air de se retrouver dans ce film sur des amours adolescentes que le...

le 19 déc. 2012

106 j'aime

40

Du même critique

L'Impasse
Marius_Jouanny
9

Le dernier des Moricains

Il faut le dire, ce jour-là, je n'étais pas au meilleur de ma forme. Allez savoir pourquoi. Mais dès les premières secondes du film, j'en ai vu un qui portait toute la fatigue et l'accablement du...

le 5 août 2015

46 j'aime

12

All Things Must Pass
Marius_Jouanny
9

La sublime diarrhée de George Harrison

1970. Un an après Abbey Road, George Harrison sort ni plus ni moins qu’un triple album de presque deux heures. Un ouragan d’inventivité et de registres musicaux, en grande partie l’aboutissement...

le 22 avr. 2016

44 j'aime

6

Les Proies
Marius_Jouanny
6

Sofia's touch

Difficile de dissocier "Les Proies" de Sofia Coppola du film éponyme dont il est le remake, réalisé par Don Siegel en 1971. Au-delà de constater la supériorité de l'original, ce qui est assez...

le 28 août 2017

38 j'aime

4