Comme beaucoup de gens, je pourrais me contenter d'aller au cinéma pour en prendre plein les yeux ; de jouer aux jeux vidéo pour me divertir sans risquer la rupture d'anévrisme ; de suivre l'orientation insistante des radios m'indiquant quelle musique devrais-je aimer cet été. Je ne parle pas ici de jouer au parfait petit mouton, mais plutôt de vivre ma vie sans m'inquiéter du pourquoi du comment, et de profiter de toutes ces sources de divertissement sans chercher à comprendre d'où ont-elles pu provenir.
Le truc, c'est que je me suis inscrit sur Sens Critique, et s'il y a bien quelque chose que j'ai vite compris avec ce site, c'est que les gens adorent se disputer sur la couleur de la chemise de John Wayne dans Rio Bravo ou sur l'intérêt de la présence de James Cameron sur Terre (Satan ou Messie ?). C'est parfois puéril, souvent idiot, mais ça démontre aussi une grande vivacité des arts et cultures en règle générale.
Donc ici, Days of Summer. C'est arty, rigolo, bien fichu dans l'ensemble, très académique dans son approche, à une époque où les pionniers Little Miss Sunshine et Juno n'étaient pas si loin, je me souviens avoir passé un très bon moment au cinéma, agrémenté de quelques débats bien évidemment de haute volée (Summer, vraie salope ou fausse ingénue ?).
Quelques mois plus tard, je me met en couple. The One, bien évidemment, celle qui fait partie de mes meilleures amies depuis quelques années alors. Je lui montre le film, éternels débat suffisamment stériles pour que je ne me souvienne plus de qui pensait quoi finalement, la miss devient fan de Zooey, comme de plus elle sait pousser la chansonnette, elle découvre She & Him et chantonne des petits trucs entraînant à longueur de journée. Ô joie.
Fast forward aujourd'hui trois ans plus tard, nous ne sommes plus ensemble (je ne te spoile rien lecteur, tu l'avais bien deviné par toi-même). Qu'est-il arrivé ? La Vie tout simplement, et ce film le démontre avec une précision infernale. C'est ici où je veux en venir : on peut considérer qu'un bon film représente une accumulation de critères techniques, auquel cas (500) Days of Summer est un bon petit film sympathique, à regarder à l'occasion, qui divisera sceptiques et adeptes sans qu'aucune des deux parties n'ait vraiment tort, mais l'on peut aussi considérer que comme toute bonne oeuvre, un bon film touche notre affect, fait vibrer certaines cordes sensibles et se fait miroir de certaines expériences passées et futures ; on parlera dans ce cas de film marquant.
Celui-ci est un film marquant. Pas parce qu'il est bien exécuté (même si ça ne gâche rien), mais parce que j'ai eu la bonne idée de le revoir dans la période propice de ma vie, cette période de transition un peu pourrie ou tu n'as pas envie de tourner la page, mais les éléments te forcent la main pour le faire malgré tout. Voir à ce sujet la terrible séquence "Reality vs. Expectations", qui a du rappeler quelques souvenirs gênants à plus d'un poilu sur Terre. Certains trouvent l'ensemble déprimant, moi j'ai l'impression au contraire que c'est blindé d'optimisme, tout est une question d'angle de vue.
Je pense qu'il est effectivement facile de considérer ce film comme prétentieux et rempli à ras-bord de clichés, et c'est mérité dans une certaine mesure, mais on y trouve malgré tout ce parfait équilibre entre justesse de propos, refus de parti-pris (ou si peu) et intrigue passe-partout pour se reconnaître dans pas mal d'éléments faisant écho à notre propre vie. Chapeau donc aux scénaristes pour ce piège cruel (mais enthousiasmant, si l'on part du principe que la vraie fin du film n'est pas Tom rencontrant Autumn mais plutôt Tom arrivant enfin à tourner la page et à démarrer une nouveau chapitre excitant de sa vie), et chapeau de manière générale à tous ceux qui ont participé à la création d'une vraie comédie romantique pour dudes, remplies de mantears mais aussi de joies et de débats bidonnant sur la gente féminine.
Tout cela, on ne peut pas le remarquer en ayant passé les vingt dernières années de sa vie dans la cave de Maman. C'est un film vivant, qui se nourrit de nos propres expériences, et qui du coup ne parlera pas tout le monde. La filiation revendiquée au Graduate de NIchols n'en est que plus ingénieuse, puisque c'était auparavant le maître-étalon d'un genre malheureusement trop avare en pépites pour nous autres mecs.
Voilà pourquoi j'aime dévorer la culture comme un putain de grizzli affamé. Parce que l'on n'est jamais à l'abri de changer d'avis sur une oeuvre, et que je viens de le faire pour celle-ci. Entre le 7 précédent et le nouveau 8, pas beaucoup de différence vous allez me dire ; mais pour moi c'est ce qui différencie un petit film pas prise de tête acheté dans les bacs à 5€ de la FNAC du bon film qui restera avec moi un petit bout de temps et que je ressortirai à l'occasion pour passer un bon moment et me remémorer certains souvenirs, bons comme mauvais. Pour ne rien gâcher, c'est aussi un bon manuel de la rupture pour les mecs, et le test de Rorschach amoureux parfait pour les filles. Les gars, vous savez ce qu'il vous reste à faire. Je me tâte moi-même à filer le DVD à Miss One, qui sait, ça remettra peut-être certaines choses en perspective ?
Ah, et puis le casting est top aussi, il fallait que ce soit signalé.