Bien aidé par sa distribution sur Netflix, 7. Koğuştaki Mucize a pour ainsi dire marqué les esprits : drame phénomène suscitant un accueil dithyrambique en surface, le mélioratif était à l’honneur en sa qualité de chef d’œuvre pour beaucoup. Mais, que nous ne nous y trompions pas, sa folle propension au tire-larme ne manque pas de mettre la puce à l’oreille : à ce titre, l’investissement larmoyant du spectateur empathique n’embue pas seulement la vue, le jugement n’y coupant pas.
Sans aller jusqu’à qualifier le procédé d’escroquerie, force est de constater que le long-métrage Mehmet Ada Öztekin ne ménage pas le spectateur : l’intrigue respire le tragique sous toutes ses coutures, de la condition « désavantageuse » de Memo à ses pérégrinations carcérales mouvementées, jusqu’au tomber de rideau aussi attendu que craint, lui qui fond dans un même creuset peine et injustice. Ainsi, le devenir de la famille du susnommé interpelle, révolte et émeut en bonne et due forme… tout en abusant de biais des plus évidents.
La grimace découle par exemple du prisme musical, la composition outrancièrement déchirante de Hasan Özsüt s’avérant coupable d’une finesse aux abonnés absents : mettant allégrement l’emphase sur la teneur poignante de séquences se suffisant à elles-mêmes, 7. Koğuştaki Mucize échoue à trouver le juste équilibre entre la puissance d’évocation de son sujet et les moyens formels employés, à l’image (moins notable certes) d’une photographie lumineuse confinant parfois au mièvre.
Fait curieux, il adapte en réalité un long-métrage sud-coréen, Miracle in Cell No. 7 : par-delà le fossé culturel, le simple visionnage de sa bande-annonce démontre d’un contraste saisissant quant à leur traitement du sujet, le cadre asiatique jouant le jeu du décalage de ton favorisant le comique. Ici, il va sans dire que le versant dramatique est largement mis en lumière, qui plus est à la faveur d’un contexte historique trouble (régime militaire) : sans pousser davantage la comparaison, la démarche de 7. Koğuştaki Mucize se veut donc pertinente et d’autant plus intéressante que l’intrigue ne se cantonne pas à l’humain seul.
Néanmoins, cela n’induit pas une efficacité irréprochable : en l’exergue, le film se cantonnera au survol de ses ramifications politico-sociales, si ce n’est en développant de manière éparse les portraits des compagnons de cellule de Memo. D’ailleurs, le récit a tendance à se disperser tout en manquant de clarté : par-delà l’intérêt fluctuant que nous prêterions, par exemple, aux « tourments » familiaux d’Askorozlu, les multiples allers-retours qu’emprunte une trame (trop) généreuse tendent à le rallonger plus que de raison.
Ajoutez-y la prévisibilité de quelques ressorts attendus, la plupart suspendus aux décisions/actes d’un Commandant abandonné à son rôle de père davantage méchant que meurtri, et voici que le visionnage de 7. Koğuştaki Mucize suscite un semblant de grimace : oui, les larmes seront de la partie, mais cela n’exclut pas quelques accrocs aussi bien formels que scénaristiques. C’est d’autant plus regrettable qu’une belle énergie l’habite de bout en bout, ses élans lyriques illustrant les atouts d’une réalisation réussie à défaut d’être subtile.
Reste une belle galerie d’interprètes, parmi lesquels une Nisa Sofiya Aksongur ahurissante de « maturité » et, en sa qualité de figure de proue, un Aras Bulut İynemli exceptionnel de « crédibilité ». Une expérience remuante que ce 7. Koğuştaki Mucize en somme, qui malgré de criantes imperfections mérite amplement que l’on s’y attarde.