En 2006, la crise américaine flambe les taux d’intérêts et engendre une armée de petits propriétaires insolvables, devenus surendettés, chômeurs et misérables en détresse, que les banques exproprient en masse avant de retaper les maisons pour les revendre plus cher. Dans ce portrait crapuleux d’une Amérique amorale aux mains des requins financiers et les vainqueurs absolutistes, le film nous embarque dans la peau d’un jeune manœuvre polyvalent, le cauchemar de l’expulsion de chez lui, mais aussi de celles vécues par enfants, vieillards et pauvres gens mis sur le trottoir, victimes programmées par la deshumanisation du plus grand pays du monde.
L’ordure cynique, froide et calculatrice à qui la besogne est attribuée remarque son pragmatisme déterminé, ses talents divers et son sang-froid, et lui propose de l’engager dans son office, dont l’indécence consiste à s’enrichir colossalement chaque jour grâce à l’ignominie de la situation. D’abord poussé par l’aboi et la nécessité, le jeune homme comprend vite la jouissance du pouvoir et de l’argent, et révèle bientôt un potentiel étonnant, sans pour autant que ne cesse de l’écarteler le poids de sa culpabilité.
L’ambiance ancrée dans le réalisme effrayant mêle brillamment l’aventure, le drame quotidien, la leçon d’humanité, le journalisme et la dénonciation socio-politico-financière. Le tout royalement mené par un surprenant et poignant Andrew Garfield, propulsé loin, très très loin du juvénile amateurisme de Spiderman, et de l’encore une fois renversant et abject Michael Shannon.