David Cronenberg décide de revenir sur les écrans trois ans après le mitigé Spider avec l'adaptation surprise du roman graphique de John Wagner et Vince Locke : l'excellent "A History of Violence". L'histoire de ce thriller narre comment le patron d'un minuscule café va sauver ses employés un soir de braquage et tuer ses agresseurs grâce à une impressionnante habileté et un sang-froid inhabituel pour ce simple père de famille on ne peut plus lambda.
Devenu le véritable héros de sa petite ville dans l'Indiana, notre gaillard va attirer l'attention d'hommes inquiétants qui semblent le connaître, affirmant qu'il n'est pas celui qu'il prétend être et qu'il serait en réalité un ancien tueur professionnel disparu depuis des années... À s'y méprendre, A History of Violence reste dans la même veine que la filmographie du réalisateur canadien avec cette incertitude concernant la réalité, ses faux-semblants et ses doutes d'identité.
Bien qu'ici la réponse se trouvera finalement (contrastant donc légèrement avec les précédentes œuvres "sans fin" du metteur en scène), l'intrigue demeure d'une puissance et d'une atmosphère énigmatique à toute épreuve, renforçant le réalisme d'une telle situation. Tom est-il bel et bien un tueur ayant renié ou tout simplement oublié son effroyable passé ou ces hommes en noir se trompent-ils de personne ? Est-il un menteur ou un amnésique, une victime ou un manipulateur ?
Cette ambiguïté et ce suspense palpable sont soutenus durant tout le métrage grâce à des rebondissements dévoilés avec prudence, gagnant par conséquent plus d'efficacité à chaque nouvelle scène. Bien qu'étant très loin de ses délires sexuels et/ou organiques, Cronenberg continue pourtant de nous servir une violence graphique toujours aussi surprenante à travers des séquences gore désormais plus réalistes et moins exagérées (mâchoire explosée, nez enfoncé par le biais de coups de poings virulents, jets sanguins multiples...).
L'homme tue l'homme avec une brutalité animale déroutante à travers des séquences d'action bourrée d'hémoglobine filmées avec maestria par un Cronenberg tout en finesse qui nous balance ces moments d'intensité sans jamais crier gare. L'œuvre est ainsi surprenante, d'autant plus grâce à son interprétation, de l'excellent Viggo Mortensen (l'un des ses meilleurs rôles) à la brillante Maria Bello en passant par le trop rare Ed Harris et l'imposant John Hurt. Un casting en or pour des prestations habitées autour de ce thriller original à contempler absolument.