Destination Finale est un paradoxe à lui tout seul, à la fois un film souvent pris de haut, qui est bien plus intelligent qu'il n'en a l'air, mais dans le même temps un film sacrément con, qui mérite du coup d'être pris de haut tellement il exploite mal un concept qui aurait pu donner lieu à un film largement plus mémorable. Dans ce film, Alex, un étudiant sur le point de réaliser un voyage scolaire en direction de Paris, a une prémonition comme quoi l'avion dans lequel il va monter va exploser. Entraînant d'autres personnes en dehors de l'appareil, sa prémonition se réalise. Par la suite, les survivants vont mourir un par un.
Un synopsis alléchant, surtout quand on ne sait pas que la réalisation du film est confiée à James Wong, le génie derrière Dragonball Evolution. Une sorte d'adaptation de la loi de Murphy, mélangé à un drame exploitant le syndrome du survivants chez une bande d'adolescents, voilà comment on pourrait presque résumer le film, sauf que dans son exécution, le film tournera vite au slasher bas de gamme. Mais commençons par le commencement, j'adore la première partie du film, du début jusqu'à la première victime, soit une bonne demi-heure de film mine de rien, qui fait tout parfaitement à mes yeux. De l'introduction des personnages, qui tout en étant stéréotypés, restent réalistes et pertinents par rapport au ton du film, la prémonition et la catastrophe en elle-même, toute la phase de deuil, de culpabilité, et d'auto-questionnement qui suit celle-ci, tout est maîtrisé jusqu'ici. Malheureusement, le concept va être souillé dès la première mort d'un survivant, et c'est là que le film passe du drame fantastique au slasher surnaturel, puisque toute la scène de sa mort est montrée, avec à la fois des coïncidences malheureuses et des interventions mystiques.
Et c'est le moment où je vais faire un truc que je n'aime pas faire habituellement, dire ce que le film aurait dû faire, au lieu de constater ce qu'il y a à constater, car Destination Finale aurait pu, et aurait dû être un chef d’œuvre, ou du moins un excellent film. A partir du moment où on nous montre cette mort dès le premier survivant, il n'y a plus réellement de suspense pour la suite, on se doute que les autres vont mourir par la suite de façons semblables, il aurait été plus intéressant de s'arrêter au point de vue du personnage principal, qui arrive après les faits, et se retrouve à ne pas croire au suicide apparent de son meilleur ami, qui n'est d'ailleurs exploité que pour faire avancer l'histoire. De même, quitte à montrer les morts, ce que le film, vu son statut de film d'horreur, doit finalement se retrouver à faire s'il vise un public avide de sang, il aurait été intéressant d'exploiter la loi de Murphy (« Tout ce qui est susceptible de mal tourner, tournera nécessairement mal ») plutôt que d'inventer bon nombre de situations abracadabrantes qui font perdre toute la crédibilité qu'avait le film jusqu'ici.
Cette loi de Murphy, associée au concept du destin qui rattrape les survivants, condamnés à mourir quelques soient leurs efforts, non seulement ça incite à la créativité concernant les meurtres, ou plutôt des accidents qui en seraient réellement pour le coup, mais en plus ça crée une réelle paranoïa que le film n'arrive pas à installer sur sa fin, car au lieu d'être poursuivis par le destin, les survivants sont en l'espèce poursuivis par un tueur invisible. Ça peut aussi ajouter un humour noir (voire humour tout court) qui manque cruellement au film, car la seule scène qui exploite réellement ce concept est celle du bus, inattendue, violente, et hilarante pour ma part. On peut considérer que celle de la décapitation est dans le même ton, sauf qu'elle en fait des caisses, et ce n'est ni drôle, ni imprévisible. L'humour du film aurait mérité d'être dans un ton constamment similaire à celui de la scène du bus, ou d'autres trouvailles pleines de créativité, plutôt que de se baser sur un Seann William Scott qui joue le même personnage de demeuré pour la 180ème fois. Une de mes scènes préférées du film est la seule, mais marquante, apparition du croque-mort, joué par Tony Todd, outre son charisme légendaire qui met à l'amende l'ensemble d'un casting assez insipide, délivre une ligne mythique (« And you don't even wanna fuck with that Mack Daddy. », réussi à être drôle, terrifiant, mystique, bref, marquant en à peine un peu plus de deux minutes.
Pour le reste, le film est très classique dans sa réalisation, James Wong étant issu de la télévision, et notamment de X-Files, c'est ce qu'on retrouve ici,et si ça colle parfaitement à la première partie, dès que les choses s'accélèrent, la mise en scène ne fait qu'accentuer les lacunes de la deuxième partie. Il faut mentionner la romance totalement foirée aussi, pas forcément à cause de l'alchimie entre les acteurs, que je trouve correcte tout au mieux, mais principalement à cause du montage foireux qui coupe une partie de la scène sur la plage, et si tu n'as jamais vu/entendu parler de ces scènes, et de la fin alternative (que je trouve meilleure au passage, même si clichée au possible), et bien tu te retrouves avec Ali Larter qui appelle Devon Sawa « Baby » sans explication, ils sont en couple d'un coup, et c'est difficile de moins bien géré le morceau.
Au final, ce premier volet de la saga Destination Finale n'est pas désagréable, loin de là, mais il s'agit à mes yeux d'un énorme gâchis de potentiel et de concept, car malgré un casting insipide, un réalisateur débutant et la promesse d'un film d'horreur destiné aux ados en recherche de gore bon marché, la première partie du film laissait envisager une toute autre profondeur à ce film, avant de finalement décevoir, et laisser face à un divertissement honnête mais tellement décevant.