Un an à suffit à Sergio Leone pour tirer les leçons de Pour une poignée de dollars, le prototype imparfait mais révolutionnaire du renouveau du western.
Clint manquait d’opposition. Seul, L’homme sans nom semait la zizanie entre deux bandes rivales. Manco conserve son poncho, assume son statut de chasseur de primes, mais Leone lui associe un concurrent. Le film s’ouvre sur le colonel Douglas Mortimer (Lee Van Cleef). Froid et méthodique, il compense l’usure de l’âge par la puissance de son arme, un pistolet à canon long et crosse amovible. Les tueurs se jaugent, se défient avant de conclure un pacte, révocable à chaque instant. Si le colonel se retrouve dans le jeune homme, Clint rejette ce qui pourrait ressembler à une forme de respect paternel.
Le scénario manquait d’unité. Leone élague dans l’intrigue secondaire, réduite à deux flash-back de quelques secondes et à l’ensorcelante ritournelle des montres, et élimine les scènes et la figuration inutiles. Il ne filme que tensions, surprises et explosions de violence.
Tensions : Assis au côté des héros, le spectateur observe, scrute, attend, comme pétrifié. La caméra pose le décor, une sublime Espagne désertique, pour s’attarder sur les trognes, hâlées, burinées et acérées des pistoleros. Accordons deux mentions spéciales pour le regard halluciné d’un Klaus Kinski affublé d’une bosse dispensable et le rire sardonique de l’Indien (Gian Maria Volontè).
Surprises : Manco et le Colonel ne sont jamais là où nous les attendons. Un infime mouvement de caméra précède leur intervention, révèlant leur présence. Per qualche dollaro in più est une succession de déceptions et de stupéfactions. Extraordinaire séquence que celle de l’attaque de banque, aussi inattendue qu’efficace par sa brièveté.
Violence. Leone ne s’interdit aucune cruauté, femme et enfant sont exécutés, hors champ. Le passage à tabac rituel des héros est long et méthodique. Seule réserve, la résolution finale, le raisonnement de l’Indien – libérer le duo pour éliminer ses partenaires – semble tiré par les cheveux.
Ennio Morricone signe une bande son fabuleuse. Elle n’accompagne pas l’histoire, mais participe à son écriture. Supprimez les dialogues, ne conservez que la musique et les regards, vous ne perdez rien.
Magistral.