Hope
7.9
Hope

Film de Lee Joon-Ik (2013)

On le sait bien, quand un réalisateur s'attaque à un sujet tel que celui de Hope, il a vraiment, vraiment intérêt à pas se viander au risque de non seulement faire un mauvais film, mais d'être en plus détesté pour avoir eu la prétention d'en parler. En l'occurence, un thème comme le viol d'un enfant demeure bien assez délicat pour qu'on t'attende au tournant au moindre faux-pas dans le traitement.


En le regardant, je me rendais compte à quel point il est difficile de faire un drame social destiné à un grand public. C'est toujours l'occasion de se faire haïr par ceux qui fuient à tout prix le gnangnan-isme chichiteux et fustigent la moindre solennité populaire. Encore une fois, bien que Hope semble avoir été largement apprécié, on peut sentir eu sein de certaines critiques cet agacement typique de celui/celle qui a eu la sensation de se faire tirer les larmes et qui trouve que le sujet était trop grave pour qu'on ait même osé le traiter, du moins de la sorte. Comme un mécanisme de protection devant quelconque minauderie un peu trop sucrée, comme la peur d'être vulnérable. Ce même sentiment qui vous aura fait détester Intouchables, alors même que toute votre famille, pour qui le cinéma se résume à une option ponctuelle disponible sur les chaînes de la TNT l'aura trouvé génial. Enfin bref, on s'est compris ?


Donc Hope, comme son nom l'indique est clairement un de ces films qui s'attaque à un thème grave et qui joue la carte de l'optimisme. Il traite les émotions de telle sorte que même le plus bougon pourrait y lâcher sa larme, le tout nappé de la musique qui va bien.
D'accord, à première vue on a pas envie d'y aller. Mais finalement, bien qu'il reste 'ce' genre de film, il est assez bien foutu pour qu'on s'y laisse aller. Certains l'ont traité de vulgaire pour les raisons citées plus haut mais au fond, il eut été bien plus vulgaire de montrer la scène de viol par exemple (remarque il aurait fallu oser). Le film, bien que nous rendant conscient de l'horreur, nous épargne les facilités propres à susciter l'effroi réactionnel d'une histoire aussi atroce.
On préfèrera se concentrer sur la reconstruction d'une famille brisée, étape par étape, que ce soit dans l'épicentre du foyer ou dans son rapport avec le reste de la société. A ce propos, comme toujours, il est indispensable de (re)garder les choses dans leur contexte coréen. Certaines interactions entre les personnages peuvent par moment paraître étranges, voire dures pour un oeil français ou plus largement occidental et c'est donc là même qu'il faudra être vigilant avant d'éreinter le film à propos de sa soi-disant vulgarité, ou d'en critiquer d'autres par méconnaissance des codes sociaux de son pays d'origine. Il faut savoir par exemple que la honte, le sentiment de responsabilité personnelle (quand on se fait violer, on est responsable), la retenue, l'honneur, l'élitisme ou encore la place de l'individu dans la société sont assez semblables aux codes de la société japonaise, avec ses nuances. Par conséquent, le traitement du sujet sera inextricable de ces derniers, au même titre que devraient l'être les critiques, à mon humble avis. C'est ce qui expliquera également l'emphase, le baroque de certaines situations (présents dans beaucoup de film coréens) et le côté parfois hyperbolique dans l'expression des émotions.
Ceci étant dit, on peut affirmer que le film dans son pays est un challenge en soi et qu'au fond il s'en tire relativement bien. C'est grâce à une mise en scène plutôt sobre que l'attention est portée sur les individus et les situations elle-mêmes avec, il faut l'avouer, une certaine propension à vouloir déclencher de la compassion et de l'attendrissement, parfois très légèrement poussive, mais toujours en deçà de mes limites et fait avec un goût certain.


En clair, Hope nous livre une histoire familiale sur les bases d'un act atroce et choisi, n'en déplaise aux cyniques, de nous en conter une version optimiste et très humaniste, tout en restant plausible. Là où il aurait été risqué de faire dans la mièvrerie irrespectueuse des réelles victimes, Lee Jun-Ik nous en propose juste une des versions probables et ne nous prive pas de jolis moments humains, en assumant totalement sa teinte mélodramatique. Mais quand c'est fait avec goût, et quand on arrive à y sentir la sincérité, on valide. Et si il se trouvait qu'on était dans un de ces moments de relâchement cérébral, on pourrait la lâcher, sa petite larme.

Gerwin
8
Écrit par

Créée

le 13 déc. 2016

Critique lue 670 fois

Gerwin

Écrit par

Critique lue 670 fois

D'autres avis sur Hope

Hope
Lilange
8

Pure espérance

Un cerf-volant, un parapluie jaune, une grosse peluche, des papillons, un monstre… Les accessoires d’un conte moderne, drame horrifiant où le pire arrive dès les premiers pas, sur le chemin sinueux...

le 28 sept. 2016

44 j'aime

9

Hope
Black_Key
8

Clair Obscur

Ça s'écrase si vite un cerf-volant. Il flotte, tournoie, virevolte dans le vent, il agite sa frêle carcasse en papier dans le ciel, et avec un peu de pluie il s'effondre. Lourd, déformé, il s'écrase...

le 24 sept. 2016

29 j'aime

8

Hope
angel25
9

La petite fille au parapluie jaune

La petite fille au parapluie jaune. Hope traite d'un sujet particulièrement grave et qui peut facilement être casse gueule au cinéma. L'agression d'enfant est ce qu'il y a de plus révoltant, il n'y a...

le 6 nov. 2013

28 j'aime

11

Du même critique

Tokyo Fist
Gerwin
9

Je souffre donc je suis

Il me fallait du viscéral dernièrement, quelque chose sans concession et jusqu'au boutiste. Malgré les promesses subversives de Tokyo Fist, j'ai eu d'abord du mal à passer outre l'antipathie qu'avait...

le 6 févr. 2016

7 j'aime

1

Night Call
Gerwin
8

L'arroseur arrosé

Avant de le voir, j'avais tout de même quelques appréhensions. J'avais vu la bande-annonce, et hors-mis un Gylenhaal pleins de promesses, le côté marketing "par les producteurs de Drive" m'avait...

le 26 nov. 2015

7 j'aime

Blue Valentine
Gerwin
9

L'amour ne suffit pas

Non non, je te jure j'adore les flingues et les gros muscles de Schwarzou ! T'en vas pas, je suis super viril en fait, c'est juste, enfin je sais pas ce qu'il s'est passé, j'étais malade je crois et...

le 27 oct. 2015

6 j'aime