Après la trilogie du dollar, Sergio Leone se lance dans un nouveau triptyque : une série de films qui évoqueront l'Histoire de l'Amérique moderne. Avant de traiter des débuts du gangstérisme et de la révolution mexicaine, Leone s'intéresse ici à la civilisation de l'Ouest. Ou comment les bandits à cheval laissent peu à peu leur place aux barons du rail.
Néanmoins, "C'era una volta il West", c'est aussi un premier chant du cygne pour le western spaghetti, qui s'apprêtait à dépérir à partir de 1969. On y retrouve certes beaucoup d'ingrédients du genre : paysages espagnols de la Sierra Nevada, jeux sur les regards en gros plans, un galeries de "gueules" en personnages secondaires, un héros mutique, une ambiance crasseuse et violente...
Mais également des éléments surprenants, qui détonnent par rapport à la trilogie du dollar, canon du western spaghetti. Tels que par exemple certains plan tournés aux USA, ou notre héros qui se fait blesser lors de la scène d'introduction. Une célèbre anecdote raconte par ailleurs que pour cette première séquence, Leone avait prévu d'engager Clint Eastwood, Lee Van Cleef, et Eli Wallach pour incarner les trois bandits abattus, symbole de la mort d'un genre et d'un système. Cependant Eastwood refusa, faisant capoter l'idée.
Heureusement, le film comporte une autre idée de casting géniale, probablement le contre-emploi le plus célèbre de l'Histoire du cinéma. Henry Fonda, connu pour avoir construit sa carrière sur des rôles d'Américain intègre, posé et justicier, joue ici le rôle de Frank, crapule poisseuse et bourreau d'enfants ! Un choix franchement culotté mais qui paye allègrement, conférant une aura incroyable à ce méchant à l'ardoise chargée, qui tente pourtant de faire partie de la civilisation de l'Ouest.
Et au-delà de Fonda, et d'un scénario historique cynique et violent, "C'era una volta il West" demeure un monument du cinéma. Une mise en scène maîtrisée de bout en bout, alignant paysages mangifiques, décors ambitieux, et gros plans puissants, permettant de rendre intense la moindre scène de dialogue ou de fusillade. La musique d'Ennio Morricone y est pour beaucoup, celui-ci proposant presque un thème pour chaque protagoniste, dont celui de l'homme à l'harmonica, sans doute l'une des musiques de film les plus célèbres.
Homme incarné par un Charles Bronson magnétique à souhait, épaulé par une Claudia Cardinale au regard écarlate, charismatique en veuve qui a de la poigne. Sans compter des personnages plus secondaires mais marquants : Jason Robards en bandit au grand cœur, et Gabriele Ferzetti qui joue un patron du rail aussi méprisable que touchant. Des personnages écrits avec subtilités, et accompagnés de dialogues percutants.
Ce monument sera un énorme succès à l'époque en Europe (14 millions d'entrée en France !), ancrant sa réputation de chef-d’œuvre du western. Il ne fonctionnera en revanche pas aux USA, la faute à la prestation iconoclaste d'Henry Fonda ?