Mon père, ce salaud
"La Corruption" est une satire cinglante et impitoyable de l'Italie de la prospérité retrouvée, où Bolognini fait voler en éclats la figure du “pater familias”, ici un despote sans scrupules...
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le 8 mai 2021
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(1963. FR : La corruption. ITA : La corruzione.
Vu en VOST, édition DVD SNC-M6)
Stefano (Jacques Perrin), jeune homme timide issu d'une famille fortunée, vient de terminer ses études avec la volonté de devenir prêtre. Une fonction qui lui permettrait ainsi d'échapper à un monde qui ne lui plaît guère… Mais son père (Alain Cuny), riche éditeur milanais sans scrupules, souhaite le voir lui succéder. Durant un week-end en bateau, il va tout faire pour qu'il change d'avis, notamment en le mettant dans les bras de Adriana (Rosana Schiaffino)...
Le grand Mauro Bolognini (de mémoire, il était apparenté aux communistes. Il est intéressant de constater qu'il se sert ici de la religion pour faire un procès de son époque), dont je n'ai vu que le très sympa L'Héritage, livre ici une belle réflexion sur son époque, et notamment sur la perte des repères inhérente aux sixties : recul de la religion (dont se moque allégrement le père de Stefano), miracle économique et la consommation qui va avec (Morandi dit à un moment qu'il y a désormais plus de produits manufacturés que d'idées…), libération, sexuelle notamment, de la femme et de la vie de couple (les parents de Stefano sont comme divorcés, le père sort avec Adriana et… la partage avec son fils !?)…
Il s'agit ici d'un film très sombre, qui fait songer au non moins désespérant Il Posto d'Ermano Olmi, sorti en 1961. On y suivait aussi un jeune homme à la découverte de la "vraie" vie, confronté à la fameuse incommunicabilité, à la solitude de l'âme, aux illusions perdues… Pour revenir à notre Stefano, celui-ci verra toutes ses bases s'effondrer : son père est un salaud ambitieux, volage, corrupteur; sa mère dépressive vit à l'hospice enchainant les cures de sommeil; Morandi (Ennio Balbo), l'ancien résistant moraliste n'est en fait qu'un arriviste. Finalement, c'est peut-être la femme, cet objet du pêché originel, celle qui entamera une fois pour toutes la corruption de Stefano, qui sera la personne la plus pure.
Les acteurs sont magnifiques, Jacques Perrin (Le désert des tartares, la 317ème section, la fille à la valise, Z...) et sa petite vingtaine illuminent le film, symbolisant superbement l'innocence. Le trop rare Alain Cuny (La piovra, Cadavres exquis, La dolce vita...) démontre une nouvelle fois l'étendue de son talent, vampirisant le film à chacune de ses interventions. L'exquise Rosana Schiaffino (aperçue dans RoGoPaG dans un rôle totalement inverse) en damnerait plus d'un...Un personnage ambivalent et ambigu, séducteur et repoussant...Une bien jolie performance. Enfin, quel plaisir de retrouver la tronche de Ennio Balbo (La Mafia fait la loi, Le grand kidnapping, sept hommes en or...) dans le rôle ingrat d'un ancien gauchiste devenu plus royaliste que le roi !
Giovanni Fusco (l'éclipse, la mafia fait la loi, l'avventura...) signe une musique bien discrète, parfois jazzy, parfois très classique. Elle colle parfaitement à un film, dont l'un des rares défauts (au-delà d'une image pas restaurée…) réside dans ses dialogues parfois trop bavards… Bref, un très bon témoignage du cinéma italien de l'époque !
La musique du générique : https://www.youtube.com/watch?v=kbA-BFXZhs0
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Créée
le 30 déc. 2020
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