Auto-qualifié «d'homme à se sortir de toutes les situations», Le Baron de Crac (ou Baron du Crac, ou Baron de Münchhausen) ne fait pas dans la culotte en dentelle quand un obstacle fait face. Une falaise ? «Boh, on fait sauter le poney et il se demmerdera pour nager jusqu'à la prochaine aventure»
Si rien n'est impossible pour Kim Possible, bah pour le Baron non plus.
Faire du n'importe quoi, pour le tchèque Karel Zeman, ça passe. Avoir un personnage qui fait n'importe quoi, ça passe. Faire un scénario invraisemblable et bordélique, hum, ça passe. Et même si on hallucine tellement qu'on ne comprend rien… bah ça passe. Le terme fantastique prend alors tout son sens. Du fantastique bien fantasque. Et ça c'est classe.
Pas de réalisme dans le récit, de la forme en découle un fond, quitte à envoyer balader la cohérence au profit de la seule chose sur lequel le film repose : l'imagination.
Ce qui fait du film ce qu'il en est, c'est l'incroyable inventivité de Karel Zerman qui va faire de ses différentes idées, presque expérimentales, le fil conducteur des aventures du Baron. Personnages réels et dessinés se mélangent dans de multiples décors cartonnés qui déboîtent, forcent le respect, pour des prouesses visuelles à faire jalouser Terry Gilliam, qui s'en inspira pour son adaptation, et sans doute pour bien d'autres projets.
Ici, tout se mélange. Les effets changent, les couleurs aussi, le ton également, et cela pour n'importe quelle raison, pour une seule scène parfois. Car oui, une seule de ces scènes cachent tellement de prouesses. Que ce soit celle dans le palais pendant la partie d'échec, ou celle dans l'eau avec les sirènes qui se métamorphosent… c'est un joyeux bordel.
Bien que la narration à effets spéciaux puisse déranger notamment avec ce ton caractéristique du cinéma Tchèque, l’accommodation se fait rapidement et renforce même le récit. Il n'y a cas voir les moments avec dialogues où se glissent quelques jeux de mots, toujours non-appuyés : le décalage renforce l'effet. La magie du non-effet fait son effet. C'est l'étrange et incohérente magie de Baron Prasil.
Et dire que nous ne sommes qu'en 1962. Une petite heure 20 de voyage Terre-Lune : un grand voyage visuel. Un petit pas pour l'homme, un grand pas pour le cinéma.