Un succès inattendu

Je dois avouer qu'en bon fan du travail extraordinaire de Jackson sur sa trilogie adaptée de Tolkien, j'étais quelque peu anxieux à l'idée que ce film ne soit pas à la hauteur, notamment à cause des premières critiques négatives et surtout au vu des nombreuses grosses déceptions en salle au cours de l'année 2012.

Cependant, la peur d'un mauvais résultat peut aussi donner suite à une bonne surprise et permettre de passer un moment des plus agréables. Toujours est-il qu'au sortir de la salle après 2h45 bien plus digestes que les 2h23 de Skyfall, je me suis plu à trouver la réplique d'un des nains à un moment-clé du film tout à fait appropriée:

Well, that could have been worse !

Dès les premières secondes, Peter Jackson renoue instantanément avec chaque ingrédient ayant contribué au succès incontournable du Seigneur des Anneaux: musique enchanteresse, décors sublimes, ambiance culte, visages familiers...

Les vingt premières minutes (ultra savoureuses) du film ont suffit à nous convaincre: nous sommes bel et bien de retour en Terre du Milieu, et Dieu comme ça fait du bien !

Alors oui, certes, il y a quelques petits accrochages : pour commencer, les effets visuels sont plus modernes ce qui pourrait laisser présager une bonne surprise. Et en fait, non: le numérique est devenu beaucoup trop outrancier - jusque dans les décors naturels -, les créatures en motion capture ont définitivement remplacés les acteurs costumés et maquillés (qui donnaient un résultat bien plus réaliste autrefois), le rajeunissement des comédiens les plus âgés se voit comme le nez au milieu de la figure...

Au final, à côté du Seigneur des Anneaux qui faisait bien plus authentique avec son atmosphère tantôt sombre tantôt féerique, The Hobbit ressemblerait presque à un film d'animation pour grands enfants (ce qui est, en soit, un choix assumé de Tolkien donc de Jackson).

Autre détail assez agaçant: ça va trop vite. Même en format classique (24/s), on en aurait presque mal aux yeux. Les scènes d'actions sont par ailleurs assez décevantes car répétitives (des ennemis de plus en plus laids et repoussants, une course-poursuite interminable, les héros en fâcheuse posture, Gandalf à la rescousse, la même musique à chaque retournement de situation, etc...). De plus, malgré tous les efforts du réal pour nous en mettre plein les mirettes, on sait d'emblée comment ça va finir. On perd donc cette précieuse adrénaline qui faisait du Seigneur des Anneaux une véritable aventure, et c'est dommage.

Fort heureusement, il y a un contrepoids de taille à ce rythme effréné: tel que cité plus haut, les 2h45 passent toutes seules. Et c'est là ce qui fait la force du film car, une fois fini, on en veut encore. Le réal est décidément un vieux renard qui n'a pas fini de nous surprendre et de nous régaler.

Côté casting, on saluera les prestations remarquables des nouveaux (Martin Freeman excellent Bilbo, Richard Armitage magnifique Thorin) tout en retrouvant avec plaisir les anciens (Ian McKellen éternel Gandalf et surtout Andy Serkis, cultissime et "précieuuuuux" - sa scène est l'une des meilleures du film). Côté bande-son, Howard Shore accomplit une nouvelle fois un excellent travail complété par la participation remarquable de Neil Finn avec Song of the Lonely Mountain, dont l'air épique, passée la première écoute, ne voudra plus vous sortir de la tête.

Morale de cette expérience: Fiez-vous non pas à des échos, des rumeurs ou des statistiques mais bien à votre instinct, à votre intuition et à vos valeurs.