Malgré quelques longueurs, Wim Wenders propose avec Le Sel de la Terre, ayant reçu le prix un Certain Regard au Festival de Cannes 2014, un documentaire d'une sincérité opérante et d'une sobriété adaptée à l'oeuvre du photographe Sebastião Salgado.
Quand il était jeune, Sebastião Salgado vivait dans un petit trou de verdure au Brésil. Les décennies qui suivirent, ils les consacrèrent à la photographie de la condition humaine, et par delà de l'humanité face aux traumatismes contemporains, notamment la situation des migrants, des mineurs, la guerre du Koweït, la famine au Sahel ou le génocide rwandais. Après tant de portraits sombres d'êtres meurtris et de malheurs immortalisés en image, le photographe n'en ressort pas indemne. Il confie que son âme est malade, un peu comme les collines de la maison de son enfance devenues ensuite sèches et tristes, sur lesquelles un vieil homme se promène et raconte - le père de Sebastião.
Il prend alors un virage à 180 degrés et décide de se lancer à la découverte de territoires vierges aux paysages grandioses, à la rencontre d’une faune et d’une flore sauvages, comme un hommage à la pureté et la somptuosité de la Terre. Le projet Genesis (2004-2013) naît de cet irrémédiable souhait de poursuivre la passion d'une vie, et de mettre cette fois son dévouement artistique au service, non pas de la détresse du monde, mais plutôt de la magnificence de notre planète. Le photographe dit "social" évolue et tend vers une oeuvre plus universelle, tout du moins en adéquation avec son ONG Instituto Terra créée en 1998, laquelle a permis de reboiser quatre millions d'arbres sur ces mêmes collines où il a grandi.
L'homme a mûri, son travail artistique également. L'histoire de sa vie et de son oeuvre, en un sens, se personnifie dans la renaissance de cette forêt, comme un message d'humilité et d'espoir à la fois pour l'humanité et l'environnement, les deux reflets de son travail. Nous apercevons enfin Monsieur Salgado au sein d'une tribu indigène, capturant des instants d'authenticité, ou au milieu de la verdoyance de sa forêt ressuscitée, et l'on se dit finalement que, quel que soit le lieu ou l'être photographié par le brésilien, le cliché révèle substantiellement les traits de l'Homme, la splendeur de la Nature, et le fragile équilibre de cette coexistence.