L'histoire policière est une variante lointaine et gentille de Crime et Châtiment (Dostoïevski) dans la mesure où un étudiant (Adamo) tue un usurier puis peu à peu grâce à l'aide d'un Juge (Bourvil) finira par assumer et expier son crime. Là s'arrête l'analogie car l'étudiant dans cette histoire est plutôt en état de légitime défense et non en état de théoriser l'utilité du crime comme le fait Raskolnikov.
Le film vaut surtout par l'humanisme de Bourvil dans son métier de juge d'enfants puis dans l'accompagnement de l'étudiant alors qu'il a parfaitement compris sa situation.
Bourvil montre, encore une fois, que le personnage qu'il joue est à plusieurs facettes : à première vue, c'est un célibataire heureux vivant avec sa sœur – un peu tyrannique mais avec un cœur gros comme ça - qui rêve de le marier ; mais on comprend vite que son célibat n'est dû qu'à un amour de jeunesse – avec une fille dite du peuple - qu'il n'a jamais pu concrétiser. Il est juge pour enfants mais rêve d'en avoir et de s'en occuper. Sa position sociale est bien installée mais il vient tous les jours au Palais en vélo (en costume avec cravate - signe de la distinction sociale – mais avec les pinces sur les jambes du pantalon). Bourvil excelle à brouiller les pistes et est bien plus profond que le look qu'on lui prête ou qu'il se donne.
En revanche, je pense que le choix d'Adamo pour jouer l'étudiant est plus discutable. C'est vrai qu'il n'est pas aidé par sa voix cassée mais son jeu manque de nuances. Il est possible aussi que le scénario n'ait pas été assez travaillé.
Un autre point intéressant du film, je dirais historico-sociologique, est le comportement chatouilleux des étudiants, dans une lointaine fac de province ! dès lors que la police pénètre dans les locaux… On est en 1966 ou 1967 (film sorti en 1967) et on peut dire que les évènements de 1968 commençaient à couver un an auparavant. On ne peut vraiment pas soupçonner Léo Joannon d'avoir surfé sur la vague soixante-huitarde…