Alors qu’il vient de finir une nouvelle marionnette, Pinocchio, le menuisier Gepetto fait le vœu que celle-ci prenne vie. La Fée Bleue vient l’exaucer, mais pour que Pinocchio devienne un enfant comme les autres, il doit montrer prouver qu’il vit de manière juste et droite. C’est à Jiminy Cricket que revient la lourde tâche d’y veiller…
Après le colossal succès de Blanche-Neige et les sept nains, les studios Disney se penchent sur un autre projet au moins aussi ambitieux : l’adaptation du conte de Carlo Collodi Pinocchio. Malgré la disparition du charme de Blanche-Neige, on retrouve dans Pinocchio une prouesse technique au moins égale, l’animation s’avérant d’une fluidité tout autant exceptionnelle et les décors étant sublimés par l’emploi de la caméra multiplane (voir le fabuleux plan panoramique qui nous fait entrer dans l’illustration du livre au début du film).
Mais si le film voulait s’adresser à tous les publics, et surtout les enfants, il était nécessaire de retravailler le scénario originel pour le rendre moins dur. Pinocchio devient donc un personnage naïf et attachant, loin de l’enfant boudeur et têtu imaginé par Collodi, tandis que le criquet parleur devient ici un des personnages principaux de l’intrigue, le personnage faisant office de narrateur (et ce n’est pas une perte puisqu’il se voit doté, lors du second doublage de 1975, de la voix française de l’immense Roger Carel, un des rares doubleurs au monde qui fait que les films qu'il double sont à voir prioritairement en VF). C’est également à ce dernier que revient presque le monopole de l’humour, celui-ci, très efficace, étant confiné aux interventions de Jiminy Criquet ainsi qu’à quelques personnages secondaires (le duo Figaro-Cléo et celui entre Gédéon et Grand Coquin : ce dernier a lui aussi la voix d'un grand du doublage, Michel Roux).
Car il en faut, de l’humour, pour atténuer le côté effrayant du récit, et si le résultat est effectivement assez plaisant, il n’en fera pas moins frissonner le jeune public par des scènes d’une dureté parfois étonnante et presque dérangeante (culminant avec la scène des mauvais garçons et de leur transformation en ânes sur l’Île enchantée, ou bien avec la poursuite entre Gepetto, Pinocchio et la baleine).
Enfin, là où Blanche-Neige témoigne d’une pureté et d’un charme sans égaux, Pinocchio, lui, cherche à nous délivrer avant tout une leçon de vie, et si le moralisme est parfois un peu trop appuyé, il n’en est pas moins efficace, mature et particulièrement marquant. Le film ne rencontra pas le succès escompté lors de sa sortie à cause de la Seconde Guerre Mondiale, mais il n’en pénétrera pas moins par la suite au panthéon des chefs-d’œuvre des studios Disney, et malgré un aspect peut-être moins familial que les autres Disney, c’est tout de même amplement mérité.