Dans une ville moyenne du nord des Etats-Unis, deux petites filles disparaissent à quelques pas de leur maison. Et ce qui pourrait commencer comme des centaines d'épisodes de séries policières américaines va doucement nous mener à suivre à la fois l'enquête et la colère d'un père.
Oubliez la marche forcée des épisodes en quarante minutes, le rythme trépidant et les rebonds sans fin car Prisoners est un film qui prend son temps. Et son temps est celui qu'il faut pour pour poser une ambiance oppressante, inquiétante, prenante… Il est difficile de ne pas se sentir touché par ce que ressentent les deux familles principales. Il est difficile de ne pas se sentir dérangé par ce que fait le père de l'une des deux fillettes. Tout comme il est impossible de ne pas se poser de question sur l'enquête car pour une fois, le spectateur a le temps d'assimiler les premiers éléments et de s'interroger sur la suite avant qu'un nouvel élément ne lui soit proposé. Oui, deux heures quarante, c'est franchement long et je ne doute pas que certains trouveront cela excessif mais ceux qui auront été emporté par l'écriture profiteront pleinement de ce plaisir rare aujourd'hui : le temps. L'enquête en elle même n'est peut être pas un monstre d'originalité, on verra parfois à certains moments des détails de façon excessivement évidente mais cette tranquillité de narration et la justesse des moments où sont distillés les nouveaux éléments donnent une personnalité forte à ce film.
Mais c'est aussi une ambiance par les images, par les décors. Tout est terriblement banal, tout est terriblement commun dans cette ville sans nom des Etats-Unis. Nous pourrions y être. L'image est claire, parfaitement lisible. D'autres vous décriront mieux que moi la façon dont Denis Villeneuve a filmé tout cela mais il y a une certaine nonchalance qui accompagne parfaitement l'écriture. Et puis cette pluie qui traverse toute la séance. Elle est là, naturelle — ce qui est très important — discrète et pourtant parfois pénible, avant qu'on ne l'oublie encore pour se la reprendre sur la tête encore une fois. Etonnant comme j'ai pu l'apprécier dès les premiers instants du film. Etonnant comme elle me marque encore. Elle aussi joue un rôle majeur dans la construction de l'ambiance.
Ceux qui marquent également mais par leur jeu cette fois, ce sont les deux acteurs principaux : Jake Gyllenhaal et Hugh Jackman (méconnaissable). Oubliez Wolverine pour ce dernier, il en est à des années lumières. Si les acteurs secondaires ne sont pas en reste, la place accordée à ces deux là et leur talent leur font littéralement crever l'écran. Si la charge émotionnelle est à ce point importante dans ce film, ils n'y sont pas pour rien.
Je suis évidemment extrêmement friand de ce genre de film et que cela altère donc nécessairement mon avis à son propos. Il est toutefois à noter que cela faisait extrêmement longtemps que je n'avais pas été à ce point emporté par une histoire, à ce point secoué par son ambiance… Je ne saurais garantir que Prisoners plaise à tous mais c'est un très bon film, à n'en point douter.