Début des années 80. John Carpenter alterne entre échecs et réussites au box-office, le futur culte The Thing se faisant détruire par la critique tandis que l'adaptation de "Christine" cartonnera l'année suivante. On le considère pourtant toujours comme un metteur en scène efficace, ancré dans le fantastique et à la patte certaine. Ainsi lui confie-t-on en 1984 le projet Starman, que beaucoup de réalisateurs ont abandonné en cours de route dont Adrian Lyne et John Badham car le scénario ressemblait trop à E.T. sorti deux ans auparavant.
Il faut dire que le script de Bruce A. Evans et Raynold Gideon (Un Homme, une Femme et une Banque), bien remanié par le confirmé Dean Riesner, possède effectivement des similitudes avec le film de Spielberg. Notez plutôt : un extraterrestre arrive sur Terre et demande de l'aide à un humain pour retrouver son vaisseau et quitter notre planète bleue. Bref, Carpenter n'a pas choisi l'originalité pour son huitième long-métrage mais plutôt la sécurité, l'échec de The Thing lui ayant fermé pas mal de portes à Hollywood. Il va pourtant rendre le tout suffisamment attractif, prévisible et surtout optimiste (une rareté chez l'auteur) pour rentrer dans ses frais et ré-obtenir les faveurs de la critique, bien que le produit final ne sortira pas du lot et sera même éclipsé par d'autres rivaux à succès.
Road movie gentillet gorgé d'humour, Starman oscille malheureusement entre l'aventure fantastique et la romance classique, le long-métrage manquant cruellement de rythme et de passages mémorables. Mené par un Jeff Bridges surprenant en extraterrestre bêta étonnamment désarticulé et une Karen Allen encore dans les petits papiers d'Hollywood, le trip à travers les États-Unis ne surprendra personne : arrêts fréquents dans les motels, station-service et l'inévitable Las Vegas, bien entendu poursuivis par les habituels membres de la NSA ici finalement pas très méchants ni très présents. Manque donc clairement un enjeu évident pour faire ressentir au spectateur l'urgence et le danger chez nos deux protagonistes en fuite.
Ainsi, avec un script prévisible et sans réel panache, de rares effets spéciaux aujourd'hui datés et peu impressionnants (a contrario de ses deux précédents films) et un final un brin mollasson, Starman reste une œuvre mineure dans la filmographie de Big John mais également un essai romantique, optimiste et non dénué de charme, le film contenant bon nombre de petites séquences amusantes et touchantes hélas proposées par un réalisateur nihiliste qui manque de maîtrise sur ces points-là. Passant derrière les succès de Spielberg, Carpenter se retrouve encore une fois à proposer un film au mauvais moment. Mais ça, c'est un peu l'histoire de sa vie...