Entreprendre d’écrire sur Sueurs Froides, c’est un peu se retrouver dans la position de l’alpiniste qui, les jambes flageolantes, contemple depuis la vallée l’Éverest qu’il s’apprête à escalader. On a cité à son propos la géométrie, le surréalisme, le romantisme, l'expressionnisme, la religion, l'amour fou, Platon, Valéry, Breton, Proust... Peu d'œuvres impliquent à ce point le spectateur, et sont en même temps aussi disposées à dévoiler sciemment leurs attraits formels : style et sujet s'y éclairent mutuellement, commentent l’ensemble du cinéma hitchcockien, résument le cinéma tout court (de Truffaut à De Palma en passant par Marker, Lynch ou Almodóvar, combien d’admirateurs, de réinterprètes, d’héritiers ?). Par exemple, de l'hélice qu’évoque Éric Rohmer dans sa fameuse analyse, on peut retenir juste une figure : celle d'un segment dont les extrémités toujours en mouvement se chassent vers l'extérieur à condition de rester unies autour du même axe immobile. On y retrouve facilement la définition du vertige de Scottie Ferguson et de ses extensions cinéphiliques et métaphysiques : le suspense bien sûr, mais aussi l’irrésistible attirance du vide, la nécessité de ne pas y succomber. On y retrouve également un motif visuel récurrent, la spirale (celle d'un escalier inextricable, d'une coiffure obsédante), ainsi qu’un thème narratif rare chez le cinéaste : la passion amoureuse. On y retrouve encore une construction rigoureusement organisée : symétrie des deux moitiés du film, jusque dans les mouvements de caméra (prédominance gauche-droite dans la première partie, droite-gauche dans la seconde), le choix d'un profil pour filmer Kim Novak (droit d'abord, gauche ensuite) ou le contrepoint lancinant de deux couleurs complémentaires, le rouge et le vert. Par ailleurs, on sait que le plus beau travelling circulaire de l'histoire du cinéma, le baiser de Scottie et Madeleine, a été filmé par une caméra fixe : seuls les acteurs (sur un plateau) et le décor (projeté) tournaient, les uns en sens inverse de l'autre. Si Saül Bass ne nous donnait à contempler les idées pures, dans la rosace spiralée de son générique, qui dit que nous les aurions si évidemment reconnues dans l'hitchcockienne caverne de Vertigo ?
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Donc tout tourne, et il est impossible de résister. Teintes artificielles, vues en contre-plongées, filtres dorés à la Mission et à la Muir Forest, travellings compensés... Plus le film avance, plus le monde dans lequel il fait pénétrer se déréalise. Les scènes s’enchaînent en des fondus liquides, le Golden Gate Bridge semble relier le ciel et la terre, la matérialité se défait et glisse dans une texture onirique faites d’ardeurs et d’anxiétés. Le personnage principal traverse ce songe comme un somnambule, aspiré par le gouffre, incapable de percevoir les choses objectivement. Sueurs Froides est un film icarien : comment toucher terre. Puisque celle-ci est personnifiée par une femme, il faut que Scottie tombe, et entraîne Madeleine-Judy dans sa chute. James Stewart, frémissant, incarne comme jamais ce mixte d'homme ordinaire américain, relevé d’un soupçon de netteté boy-scout, et de rêveur solitaire. Inexorablement gagné par une obsession morbide et névrosée, il passe du statut de victime manipulée à celui de bourreau inconscient. Comme lui, le matériau du film semble sous l’empire d’une haute pression déformante. Jamais sans doute, que ce soit dans l’envoûtant tracé automobile au sein du relief tortueux de Frisco, dans le syndrome ambulatoire de Scottie, dans l’image en suspension aquatique de Madeleine revenue d’entre les morts, Hitchcock n'aura autant soumis son récit à la frappe brûlante d'une effraction intime. Le prologue se déroule dans une atmosphère d'intermonde : une sorte d'indécidabilité affecte cette scène de toits, où un ciel trop bleu, des façades trop bistre, les clignotements lointains d'enseignes, le fond légèrement opalescent d'où sort le visage en gros plan du policier salvateur, contaminent la réalité possible par l'infiltration du cauchemar. Fondu au noir. Le thriller est terminé, Sueurs Froides peut commencer.
On a souvent envie de ne croire qu’aux œuvres qui laissent au cœur une écharde. C'est la merveille de ce film qu'Hitchcock y peigne la folie d'amour sous la double couleur du miracle et de l'imposture. Cet amour si violent et si fragile est le fruit du mirage des sentiments et de l'artifice des hommes. Il naît, grandit, puis il meurt, il refuse de vivre quand les yeux se dessillent ou qu'il n'a plus rien sur quoi s'hypnotiser. Selon ce que l'on croit, on appellera ce halo de la passion imaginaire ou transcendance, néant ou mystère de l'être. Comme le chien court après son ombre, Scottie traque une chimère, puis un fantôme, une idée de femme devenue pour lui plus réelle que cette femme même. Il boit sa hantise et sa destruction par la traîtrise de son condisciple. Et nous, spectateurs, assumons délibérément le philtre, sans illusion mais non sans espérances. Madeleine et Judy, son double, puis la triple synthèse d'une vivante, d'une morte, d'une fausse morte (cette Judy à qui Scottie, au fait de la vérité, déclare : "Je vous aimais tant, Madeleine") est seulement l'élue du mythe, l'objet de sa visitation. Certes elle est belle, lointaine, et, rançon de cette distance, de glace jusque dans le feu. Le cinéaste lui compose un visage de cire pétri dans la matière même des cierges. Mais la qualité presque standardisée de son élégance, son port de patricienne sophistiquée, le dessin strict de toute sa personne la constituent en figurine de mode, en médaille, dont la réalité de nos rues (celles qui, entre autres lieux, conduisent aux cinémas) multiplie les épreuves quasi identiques. Il y autant de savoir-faire que d'art inspiré dans la "reconversion" que Scottie réalise de Judy en Madeleine. Travail de détective, de médecin légiste, aussi bien que de Pygmalion.
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Dès l'entrée du héros dans l'hôtel colonial, Hitchcock propose le thème de la rose, comme l’indique le lustre emperlé qui pend du plafond. Elle n'apparaît d'abord que de dos, assise à une table, désignée lentement par un travelling avant qui paraît soumis à un début de paralysie, comme s'il se mouvait dans un milieu où la densité d'atmosphère avait subitement changé et opposait une résistance anormale. Ce n'est pas seulement l'irruption d'une durée ressentie subjectivement et qui se dilate, altérée par son érotisation. C'est aussi qu'une schize étrange attribue une perspective ne pouvant pas être tout à fait celle de Scottie, car il n'a pas encore vu Madeleine. Mais déjà sa force captatrice agit, un des indices par lesquels le film subit la contagion du héros. Le soleil ni la mort ne peuvent se regarder en face, et c'est ainsi qu'est déterminé le découpage de la scène, où la fixité du profil de statue grecque, comme en attente de son sculpteur, se détache sur un fond cramoisi qui le magnifie. Le détour que Scottie s'impose réalise admirablement la certitude et la peur de s'égarer, la crainte d'aller trop droit au but et de se découvrir, le retrait ébloui devant la force de cette attraction à laquelle il cède. Les girations de la vis, Hitchcock ne les figure réellement qu'aux moments d'entière proximité, quand les amants communient dans la passion ou dans la haine : disputes et baisers — délires authentiques et vertigineux. Ils se vrillent alors sur eux-mêmes, comme des papillons transpercés, appuyés à un mur ou un arbre. Mais à cet instant, il n’y a aucun dialogue, aucune parole, la reconnaissance impossible se fait sous le registre de la symbolisation. Il ne faut rien d'autre pour faire partager au spectateur l'acceptation arbitraire par Scottie de cette filature.
Alors la ronde commence, lente, méditative, et jamais le spectacle d’un homme suivant longuement une femme ne fut aussi subjuguant. Insensiblement, la contemplation voyeuriste tourne à la transe. Scottie, qui croit Madeleine possédée par son aïeule, est possédé à son tour. Les lieux traversés par la jeune femme, vêtue du tailleur gris-bleu qui inspirera celui habillant Naomi Watts dans Mulholland Drive, sont comme monumentalisés : le musée aux grandes salles désertes, l'église qui précède la nécropole, l'hôtel où elle vient prendre une chambre. Ce rite se reproduit à chaque fois : passer un sas avant d’émettre un rayonnement d'idole optique. Une impalpable poussière lumineuse la nimbe au cimetière, où un travelling débusque des roses jaunes et des bougainvillées, emblèmes de Carlotta ; l'écran translucide d'un vélum donnant sur la rue ne fait rien voir d'autre que sa diffusion blanche. Au magasin, Madeleine se reflète dans un miroir où elle se regarde avec une intensification de cristal multipliant son aura, sur le fond floral d'un immense bouquet multicolore. C'est le moment intouchable, mutique et processionnel, forme sacrale de l'idéalisation, enveloppé par ce San Francisco vidé de toute autre présence que celle de Midge, la femme domestique, trop maternelle, trop accessible. Car les mobiles de Madeleine, Nadja du Pacifique, âme errante tombée d’ailleurs, être de fuite réfractant les mystères de la condition humaine, nous échappent moins que Madeleine elle-même. Ses premiers coups d'œil pouvaient être le fait d'une duplicité. Le dernier, qui la perd, les rend à leur nature d'insaisissabilité. Madeleine, qui pourtant aime, est toujours au-delà de son amour. Vertige : reflet d'un reflet d'un reflet de rien. Le mari crée un personnage à la ressemblance de sa femme. Judy l'incarne : c'est Madeleine. Elle se prend à l'amour de Scottie : c'est Madeleine-Judy. La passion de Scottie subjectivise et transfigure cette Madeleine-Judy en Madeleine ; Madeleine se tue. Scottie rencontre Judy. II veut la métamorphoser en Madeleine-Judy. Elle résiste, puis cède à un compromis qui contredit moins sa personnalité réelle que ne le faisait MadeIeine-Judy. C'est Judy-Madeleine. Scottie retrouve enfin Madeleine. Presque en même temps, il apprend que les deux Madeleine n'étaient qu'une copie, d'après l'original d'un assassin. Mais Kim Novak ne pourrait-elle, comme elle le tente au sommet de la tour, réunifier dans sa personne copie et modèle, fiction et vérité ?
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C'est qu'il y a deux mises en scène dans Sueurs Froides. La première, criminelle, de Gavin Elster se déroule pour une part dans des plis invisibles du film. La deuxième est bien sûr celle de Scottie, qui met en place un rituel de nécromant : comment remodeler à partir de l'autre femme vivante, la première, morte, bien qu'il ignore longtemps que ce soit la même. En façonnant un être hybride, il ne fait que réactiver le simulacre qui l’a ensorcelé. Ces deux machinations s'emboîtent et constituent une sorte de perspective elle-même reprise par une autre ligne de fuite, visage renvoyant à un autre visage, tableau de Carlotta Valdez que contemple Madeleine, comme si elle se mettait dans l'axe d'une profondeur, devenant la duplication de ce portrait. Pour que Scottie lui parle, il faudra qu’elle se soit jetée dans la baie de San Francisco. L'ellipse majorée par le plan sur ses vêtements séchant dans la cuisine, chez le détective où elle se réveille, donne à ce transport évanoui la probabilité d'une contemplation d'elle absente et déshabillée, et la seconde vision y ajoute cette autre probabilité qu’elle l’ait su et s’y soit abandonnée, consentante. Étrange voie pour une réciprocité précaire, où l'autre est devenu accessible par le biais pervers d'une abolition temporaire, avant la chute du haut du clocher puis le procès par lequel le coroner, avec une science retorse des fonctionnements de l’esprit, exonère Scottie de toute responsabilité pénale mais laisse à sa conscience le soin d'examiner l'ampleur de sa responsabilité. L’usurpateur qui prétendait rivaliser avec son créateur et qui a péché par hubris se verra ainsi rappeler à sa faillible condition. Seul le metteur en scène, à la fois Dieu et Satan, peut contempler son univers sans vertige. À cet égard, le cadrage en plongée quasi verticale sur la silhouette minuscule de Scottie sortant en titubant du cloître après la chute de Madeleine est-il, plastiquement, un matte-shot qui pourrait figurer, vu du ciel, un paysage métaphysique de Chirico. Et on peut se demander si la stricte éducation catholique d’Hitchcock ne lui inspire pas ici un blasphème inconscient : le Diable serait celui qui tire les ficelles, Scottie un Christ manipulé et Madeleine un mélange d’Ève et de Marie, à la fois celle qui perd et celle qui sauve.
Si la spirale du désir s’ouvrait dans l’œil de la femme, elle se déroule dans la seconde partie en sens inverse, dans l’œil masculin. Après avoir été l’objet de la mise en scène, Scottie en devient le sujet. On aurait pu craindre que le genre criminel n'ait imposé à Sueurs Froides cette sournoiserie qui, pour maintenir le spectateur en suspens, pour sauvegarder l'énigme, et dans celle-ci un semblant de cohérence aux caractères, aboutit généralement à des jeux contre nature : le faux vécu comme vrai, le vrai vécu comme faux. Pas un instant qui ne soit ce qu'il doit être : juste dans la feinte, juste dans la vérité. Généralement, on revoit ces exercices de mystification seulement pour avoir le cœur net. Or le film d’Hitchcock est tout le contraire. Scottie n'a rien à cacher. Le visage du mari demeure de marbre, bien sûr arbitrairement, avec quelques éclairs dénonciateurs. Mais l'insondable sourire réprimé de Madeleine, beau à rendre niais celui de la Joconde, s'éclaire de toute la palette de ses ambiguïtés : ironie, défense de comédien, angoisse dominée, courte pitié, joie gamine de se sortir sans à-coup d'un rôle écrasant, plaisir de se voir aimée, attendrissement sur une belle rencontre sans lendemain. Judy, elle, ne s’éclaire pas de ce sourire-là. La comédie est finie ? Au dénouement pourtant, elle recommence. L'étrange pli refleurit alors sur les lèvres de la fausse Madeleine ressuscitée, qui consacre l'irrémédiable différence de la copie à l'archétype, de l'ombre à l'idée. Mais il y a plus. Sans les conventions et les ressorts de l'intrigue policière, le film n'aurait jamais disposé de cette liberté royale selon laquelle il s'insère de plain-pied dans le mythe. Le cinéaste, sans préambule, sans subterfuge d'aucune sorte, sans ce pari de rigueur que les contes affectent de tenir, instaure celui-ci dans l'irrésistible évidence du scope, du technicolor le plus véridique et d'un réalisme de l'apparence que dément seul le trucage de quelques rares plans subjectifs (chutes ou cauchemars).
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Le style d’Hitchcock visualise physiquement la fascination comme mouvement de l’âme : on est attiré dans un gigantesque tourbillon, hélicoïdal, irrationnel, fantasmatique. Film poignant et funèbre, œuvre profondément dépressive sur le rêve et la perte, la culpabilité et la douleur, la propension à se perdre dans un univers en apparence ordonné, Sueurs Froides se présente comme un monument de pierre que chaque approche de la caméra, chaque élan des héros mine de l’intérieur, corrode lentement, sans que jamais il ne s’effrite. Le cinéaste enregistre ces impondérables variations sismiques, s’en divertit, s’en émeut, s’en affole. L’homme (Scottie) est une forme verticale tiraillée entre le haut et le bas, entre le ciel et la terre ; la femme (Madeleine) est toute en courbe, en replis ténébreux, en sinusoïdes et en maelstroms. Le moindre élément de décor, les objets les plus usuels, les rues en pente de la ville, le couvent espagnol, la jetée, la tour, l’escalier, les coupoles, les arbres millénaires diffusant un éclat d’outre-monde, l’accroche-cœur et jusqu’aux méandres de la roue, tout prolonge à l’infini l’idée initiale d’une dissymétrie de nature ontologique. Et tout est décrit avec une méticulosité architecturale, une ingénuité de commencement du monde. Fruits d’une grandiose composition picturale, les images constituent une suite de tableaux baroques, narcotiques, pleins de tensions et de retournements. La pure sensorialité de leurs couleurs crée aussi le lien avec la musique, art qui sait comme aucun autre accentuer le sentiment existentiel. Ce n’est pas un hasard si la superbe composition lyrique de Bernard Herrmann s’inspire du Tristan et Iseult de Wagner. Les deux leitmotivs de la partition trouvent une force complémentaire, l’un scandant la rigidité de l’obsession, l’autre ouvrant l’espace de l’intensité amoureuse et transformant la droite en une courbe qui revient sur elle-même. Scottie recherche en Madeleine une femme qu’il a aimée dans une vie antérieure ; il essaie désespérément, comme autrefois l’inconsolable Orphée avec Eurydice, d’arracher des enfers une amante disparue. Dans ce contexte, le passé semble provenir du fin fond de l’avenir, ce qui rend son inquiétante présence toujours plus palpable.
On sait à quoi l'extraordinaire séquence de la résurrection de Madeleine doit son pouvoir de magnétisation : elle consacre une victoire sur le temps. Il y avait eu, à l’Empire Hotel, cette mystérieuse germination de lumière verte, spirituelle et enivrante. Il y avait eu la confrontation avec les séquoias et ses anneaux sinueux, cette rencontre de deux vertiges, l'un fantastique, l'autre naturel, vertige des siècles sur la coupe d'un géant, et le passage tout normal de l'un à l'autre. Cet arbre de la Connaissance qui rappelle au visiteur sa condition d’être mortel, ce passé englouti et toujours présent faisant se rejoindre dans leur ombre de cathédrale et de tombeau le plausible et l'insensé, c'est le plus juste éclairage que la passion pût se donner : inhumaine, surhumaine, en guerre contre le temps. Il y avait eu ce baiser au bord de l’océan, où la vague, en un accord cosmique et fracassant, avait scellé leur amour dans l'éternité. Pour Scottie, enquête et conquête se confondent dans un même égarement mélancolique. Déjà, au pied du clocher, Judy avait réitéré les refus déments et les aveux de Madeleine. Peu de climax sont aussi bouleversants que cette ascension à la fois curative et tragique où, chacun des amants craignant l'autre, la conjonction totale s'identifie précisément au rituel de la reconstitution du crime. Car si le héros est capable cette fois de monter jusqu’au sommet, le dénouement est le même : Judy bascule dans le vide. Parce qu’il a voulu qu’elle soit Madeleine jusqu’au bout, jusqu’à la mort. Le dernier plan, terrible, s’éteint sur Scottie qui regarde vers le bas, désubjectivé et ballant contre la chaux de l’édifice. Coupable sans aucun doute. Irrémédiablement damné. Devenu quête du Graal, le film policier connaît son assomption : il s’est mué en mélodrame flamboyant. Solitude, rencontre, échange, contact, distraction, perte de l’être aimé, solitude encore : chaque nouvelle plongée dans l’œuvre approfondit cette approche microcosmique, presque subliminale, de l’univers qu’elle déploie. Voir un tel film, c’est se laisser sidérer, c’est-à-dire, littéralement, capturer par les astres. La passion est un beau mensonge. Pourtant nous voulons y croire. À nos risques et périls, nous lui réclamons toujours de nous éblouir.
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