--- Bonsoir, voyageur égaré. Te voila arrivé sur une critique un peu particulière: celle-ci s'inscrit dans une étrange série mi-critique, mi-narrative, mi-expérience. Plus précisément, tu es là au huitième épisode de la cinquième saison. Si tu veux reprendre la série à sa saison 1, le sommaire est ici :
https://www.senscritique.com/liste/Vampire_s_new_groove/1407163
Et si tu préfère juste le sommaire de la saison en cours, il est là :
https://www.senscritique.com/liste/Secret_of_the_Witch/2727219
Et si tu ne veux rien de tout ça, je m'excuse pour les parties narratives de cette critique qui te sembleront bien inutiles...---
Et c’est la chute, le drame, le naufrage, même avec Tilda Swinton en capitaine, le navire Suspiria n’arrive pas à contourner cet énorme iceberg en forme de remake.
Alors Suspiria aura quand même réussi le double exploit de me laisser muette d’admiration face à sa première édition, et muette de consternation face à la seconde. A nouveau, mais pas pour les mêmes raisons cette fois-ci, je n’ai pas grand-chose à en dire, à part un fort « c’est nul », pas très constructif je vous l’accorde. Tilda Swinton serait incroyable même dans un documentaire sur les huîtres, mais ni son formidable charisme, ni son impressionnante capacité à se glisser avec tendresse dans des rôles de monstres terrifiants (à nouveau et pour toujours, Only Lovers Left Alive je t’aime), ne parviennent à redresser la barre. Et le film s’enfonce encore d’un cran quand il (alerte spoiler) décapite sa tête d’affiche et seul point positif, par un désastreux tour de scénario aussi absurde qu’inutile (mais waw, c’était tellement transgressif de faire mourir un personnage important à la fin) .
Car ce scénario est l’un de ces objets terribles, peu confiant dans son matériel de base, qui se croit intelligent en se gonflant artificiellement. En une heure de plus de métrage, il n’apporte que du vent, et balaye toutes les bonnes idées (pourtant multiples) de son prédécesseur. Adieu scène de l’invasion de vers, adieu amitié bancale entre les deux héroïnes, adieu scénario subtile et paranoïaque. Ici on montre et révèle tout au fur et à mesure, sans subtilité et tout en fadeur.. Au propre comme au figuré. Car oui, même avec ce scénario qui semble n’avoir rien compris au génie de son prédécesseur (le comble pour un remake), le film fait pire encore, en ridiculisant les couleurs franches et assumées de son aïeul, tellement novateur avec son incroyable capacité à rendre la couleur horrifique. 40 ans plus tard, le film est moins audacieux que ne l’aurais été son précurseur, même sorti à la même date. On se vautre dans les couleurs désaturées et l’obscurité commune. Et même cette tentative ratée de se rattraper sur la scène finale (enfin presque, parce qu’en plus d’être long et ennuyeux, le film joue les prolongation avec deux scènes conclusives) ne remontera pas même d’un cran le niveau : le Suspiria de 77 avait de génie cette curieuse façon d’assembler les couleurs, de mettre en opposition des teintes aussi irréaliste qu’inhabituellement juxtaposées. Mais là, bon, on aura vu plus astucieux que cette façon de penser « bon on va rendre hommage en mettant de la couleur, mais bon on va pas trop se mouiller, on va mettre du rouge, parce que le rouge oh la la c’est la couleur du sang et du danger donc ça fait quand même peur, et on va surtout pas se casser les nénettes à mettre autre chose que du rouge, c’est bon le contrat est rempli ». Non, le contrat n’est pas rempli, et si le cinéma d’horreur m’a appris une chose, c’est qu’il vaut mieux ne pas déterrer les ancêtres. Ça vaut peut-être aussi pour les films eux-mêmes.