Umberto D, c'est d'abord un récit épuré, sans grands effets ni mise en scène sophistiquée, refusant les grands ressorts dramatiques de la tragédie, à l'image des personnages néo-réalistes et de leur vie simple et humble.
Le revers de la médaille, c'est que le scénario de Zavattini (l'homme qui accompagne De Sica dans au long de son époque néo-réaliste), redondant, sans vraiment de développement, écrit semble-t-il en peu de jours, manque de profondeur. Certes derrière l'apparente bonhomie de ce vieillard "seul au milieu des solitudes" se cache une complexité de caractère du personnage de Umberto (joué par un acteur non professionnel): celui-ci suscite la pitié du spectateur et l'empathie du cinéaste et en même temps il fait preuve lui aussi d'égoïsme, de lâcheté (principalement avec Maria, la jeune servante). Certes aussi le parallélisme entre l'histoire du vieux dont le chien disparaît et de la gamine enceinte mais qui ignore l'identité du père est pertinent.
Néanmoins le misérabilisme, qui correspond à une réalité indéniable de l'époque, se retrouve il est vrai peint ici sans pathos (comme l'appuie la force de suggestion des images d'un De Sica pudique: la scène où Umberto regarde par la fenêtre et pense à l'innommable, ou bien lorsqu'il pense à faire la manche, rappelant par cette absence de paroles un cinéma muet comme La foule de Vidor ou Chaplin) mais avec une certaine pauvreté idéologique (absence presque totale de critique sur le travail politique) et formelle (un gros plan depuis l'extérieur sur Maria à la fenêtre, et guère plus) qui traduit non seulement les enjeux éthiques du cinéaste mais aussi et surtout une véritable indigence narrative et esthétique de la part d'un De Sica capable de faire mieux – comme bien sûr avec le voleur de bicyclettes, dont Umberto D semble une pâle copie, ou dans La Ciociara.
6,5/10