Titre relativement mal-aimé dans la riche filmographie de Henry Hathaway, "23 Paces to Baker Street" constitue à mes yeux un bon divertissement policier.
Il faut dire que je suis très client de cette atmosphère londonienne brumeuse, Hathaway exploitant les codes du mystère souvent rattachés à la capitale anglaise, et ce dès le titre original qui renvoie de manière transparente à Sherlock Holmes.
L'autre référence qui plane sur le film, c'est Alfred Hitchcock, et en particulier "Rear Window" (sorti deux ans plus tôt), qui partage quelques caractéristiques communes avec "23 Paces to Baker Street", à commencer par le couple d'enquêteurs amateurs, dont l'homme plus âgé souffre d'une infirmité (ici, le héros est aveugle), dialoguant sur un balcon en début et en fin de film, à l'image de James Stewart et Grace Kelly.
A l'instar du Maître du Suspense, Hathaway sait parfaitement instaurer le mystère, puis distiller une tension constante, en dépit d'un rythme plutôt lent qui pourra en rebuter certains.
De même, les "scènes d'action" sont rares, mais d'une efficacité redoutable, à l'image de la filature (prétexte à une petite visite touristique de Londres), la scène dans la maison en ruines, ou la séquence finale dans l'obscurité.
La cécité du héros est bien exploitée par le scénario et la mise en scène, avec une utilisation pertinente des sons (le flipper!) et des odeurs.
En revanche, le couple formé de Van Johnson et Vera Miles n'affiche pas un charisme débordant, d'autant que leurs rapports sont régis par un conservatisme poussiéreux, dans lequel la femme reste sagement soumise aux décisions du chef.
Cela dit, cet aspect désuet contribue au charme intemporel du film, corroboré par quelques effets visuels datés (transparences, matte painting), et par la présence de seconds rôles savoureux tels que le majordome (Cecil Parker), la patronne du pub (Estelle Winwood), ou encore Lady Syrett (Isobel Elsom).