You were never really here commence comme un film de Refn : rigueur de la mise en scène, mise en place d’une atmosphère pesante, gestion impeccable du rythme, pouvoir de fascination assez immédiat, et attrait pour une violence marquée s’imposent ainsi dès l’ouverture, impressionnante et prometteuse.


Clairement, le film sera marqué par une ambition de mise en scène, et rivé à son comédien, un Joaquin Phoenix aussi massif et brutal que ravagé intérieurement.
On aimerait que la cinéaste s’en tienne à ces ambitions premières, qu’elle maîtrise indéniablement, et pousse plus loin que pour We need to talk about Kevin, et qu’elle puisse conduire son personnage dans une intrigue qui marie l’équilibre entre sa rigueur formelle et sa trajectoire émotionnelle.


Mais ce qui semblait un programme n’est en réalité qu’un prélude pour Linne Ramsay, qui va se laisser déborder par un trop plein d’ambitions qui, visiblement, en ravira plus d’un. Le film a suscité moult applaudissements lors de sa projection à Cannes, et s’est vu remettre le prix le plus usurpé du palmarès, celui du scénario, dont il partage l’absurdité avec Mise à mort du cerf sacré.


Tablant sur une violence extrêmement crue, tant physique (mutilations au marteau, cervelles explosées, dent arrachées…) que psychologique (pédophilie, comportement suicidaire), Ramsay joue de la stratégie de l’écran de fumée : son intrigue, bien balisée, (en gros, le tueur taciturne flanqué d’une jeune fille innocente et délicate, la belle et la bête, Léon, Taxi Driver, tout ça…) est une enquête des plus convenues impliquant les plus hautes instances politiques dans les plus basses affaires de mœurs, tandis que le traitement auteuriste de la forme tente péniblement de nous faire croire qu’une autre dimension est accessible. Mélange des temporalités, séquences fantasmées et cauchemardesques, montage cut, faux raccords musicaux censés mimer les ruptures mentales du protagoniste, tout se mélange dans un maelstrom poseur et dénué de véritable substance. L’usage on ne peut plus pénible de la musique en est l’un des signes les plus patents, ajouté aux poussives répétitions de ce compte à rebours en voix off.


On ne nie pas la qualité de la photographie, et quelques images oniriques sont certes marquantes. Mais cette confusion du point de vue, ce jeu assez limité consistant à river le spectateur sur un point de vue déficient pour lui asséner des séquences réelles ou fantasmées tourne rapidement à vide. Le titre original, (« You were never really here », remplacé par un autre en anglais pour la France, et tout aussi inepte) de ce point de vue, aura eu le mérite de l’honnêteté : de ce parcours aux circonlocutions formelles et narratives, il ne reste au final pas grand-chose.

Sergent_Pepper
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le 8 nov. 2017

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Sergent_Pepper

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