Le polar ou le film d’action français, c’est toute une histoire. S’il a connu de belles heures de gloire jusque dans les années 1980, le genre, comme partout ailleurs, s’est essoufflé. Galvaudé par les séries télé, épuisé par de mauvais films dans une période où il ne parvenait plus à se renouveler, il n’a jamais vraiment réussi à redécoller. Dans les autres pays, on a réussi à lui donner de nouvelles directions qui l’ont, dans une certaine mesure, relancé, mais en France, hormis quelques polars sociaux, on s’est borné à copier ce qui se faisait de l’autre côté de l’Atlantique, à l’image notamment de nos séries télé.
Difficile de ne pas penser à cette démarche devant ce A bout portant. S’il reprend l’esprit français hérité des années 80 et, plus récemment, d’Olivier Marchal avec ses drôles d’histoires de flics bien pourris, on sent une volonté de lorgner du côté du film d’action made in USA. La démarche est compréhensible, le travail honorable mais le tout souffre de trop nombreux handicaps pour convaincre. Au-delà de son histoire à dormir debout (mais c’est souvent le cas des films d’action), on va vraiment ici un peu trop loin dans de nombreux domaines (les mecs mourants capables de piquer un 100 mètres à leur réveil, les ripoux complètement barrés, les péripéties trop rocambolesques).
Si le rythme est endiablé et permet de rester connecté tout le long, l’interprétation des personnages secondaires est beaucoup trop approximative pour convaincre (froncement de sourcils, serrage de mâchoires) et le scénario ferait passer n’importe quel opus de James Bond pour un documentaire rigoureux sur le quotidien des services de l’espionnage. Certaines scènes sont saisissantes et bien fichues, le duo d’acteurs fonctionne pas mal, la caméra sait rester plutôt sobre, mais on a quand même cette inlassable impression de regarder un épisode survitaminé de Section de recherches ou un Jason Bourne du pauvre. Ce n’est globalement pas déshonorant mais cela manque de personnalité et ne colle pas assez à notre façon de faire du cinéma.