Je ne comprends plus les critiques. On réclame tous des films originaux à longueur de journées et quand, finalement, on nous en sert un sur un plateau, on le descend directement. C’était pareil avec The Nice Guys.
Sérieusement, c’est pour ce genre de films que je vais au cinéma. Pour être surpris, pour vivre une expérience qui ne ressemble à aucune autre. Vive les concepts 100% originaux, cette espèce en voie de disparition qui effraie tous les grands studios et les spectateurs. A Cure For Wellness ne fera peut-être pas autant de dollars que leurs scénarios prémâchés mais il ne tombera pas dans l’oubli. Au contraire, on se donne rendez-vous dans dix ou quinze ans et il sera devenu culte. Il sera analysé en long et en large, chaque indice sera soulevé pour comprendre les intentions de l’auteur.
On peut se concentrer sur l’évidence pour commencer, sur ce qui n’est pas ouvert au débat. La cinématographie est incroyable. Je ne sais pas par quel miracle Verbinski, ou son directeur de la photographie attitré Bojan Bazelli, sont passés de Lone Ranger à cette merveille. Je ne vais pas un faire étalage de superlatifs tellement ça saute aux yeux, chaque plan est à couper le souffle. Mais le travail ne se limite pas à la prouesse visuelle, ces plans sont aussi lourds en symbolique. Par exemple, de nombreux shots utilisent la réflexion, un effet miroir qui revient constamment. La surface de l’eau, thème majeur dans le film, opère comme une délimitation entre le rêve et la réalité.
Par contre, on peut se mettre d’accord pour dire que les gens qui s’occupent du montage des trailers sont la pire racaille sur cette terre, le bas-fonds des charognards qui ne méritent aucun respect. Ils perdent tout leur intérêt quand ils se transforment en best-off. En trois minutes, ils ont compilé tous les plans possibles, du premier au dernier.
Et on peut rajouter dans cette catégorie les traducteurs français des titres, qui, avec un seul mot, dénaturent et gâchent tout un film.
On peut ensuite se pencher sur ce qui fait tiquer, l’histoire. Les ficelles qui se présentent au début sont grosses et s’offrent à nous trop facilement. On pense donc tout savoir dès les premières scènes d’introduction. Mais plus le film avance, plus les certitudes se dissipent, le doute s’installe. Ces grosses ficelles qui prennent toute la place opèrent comme cache-œil de plus petits indices, qui prendront leur importance plus tard.
Malgré la durée du film, j’étais accroché à mon siège constamment. Le mystère s’intensifie au fur et à mesure qu’on s’enfonce dans les dédales du superbe et presque irréel château Hozenzollern en Allemagne, privatisé pour l’occasion. A ce titre, la comparaison avec The Shining et surtout Shutter Island tient la route.
On rencontre ainsi les différents pensionnaires et le personnel du château. Si Jason Isaacs continue son rôle vicieux de The OA en directeur terrifiant du centre de bien-être, c’est Mia Goth, la seule jeune pensionnaire qui intrigue directement. Elle m’a fait frissonné à chaque parole et son personnage est d’une profondeur intellectuelle très poussée.
Cette montée en puissance d’une incroyable bizarrerie revendiquée, d’un glauque coréen intense, d’une originalité puissante, se finit sur un twist perturbant et même dérangeant mais jusqu’au-boutiste dans un final fou. Et tant pis si tous les éléments ne s’additionnent pas dans les dernières révélations, c’est tellement courageux de sortir ça aujourd’hui que je n’ai qu’un mot. Merci.