À fleur de peau
4.4
À fleur de peau

Film de Zalman King (1991)

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Elle a tout du navet kitsch, et pourtant la première réalisation du producteur de 9 1⁄2 Weeks reste aujourd'hui surprenante à plus d'un titre. Car tout en exploitant un filon qui semble lui réussir, celui de la romance érotique, Zalman King dessine en filigrane tout un pan interdit des mœurs de l'Amérique reaganienne.


Il serait facile de s'arrêter sur l'esthétique cheesy de Two Moon Junction, contaminée jusqu'à la moelle par les années 80. Fondamentalement, les premières notes du scénario n'incitent pas à grand chose si ce n'est à esquisser un sourire narquois devant cette sublime blonde s'amourachant à deux semaines de son mariage d'un étalon torse nu façon Channing Tatum 80's, paré d'un mulet frisé du moins bel effet et d'un Levi's moule-paquet, et qui au fond tient plus d'un fantasme gay que de l'idéal féminin. Comment ne pas pouffer également devant la sensualité surannée des scènes de sexe, baignées comme il se doit dans les projecteurs bleus et les solos de saxo, ou devant le malin plaisir que le scénario prend à se torcher les miches avec la cohérence.


Il faut pourtant passer outre et remettre le film dans son contexte pour réaliser que Zalman King n'avait pas pour unique ambition d'émoustiller le tout-venant. Two Moon Junction est un enfant des années SIDA, et donc de la vague de puritanisme propagée par le gouvernement républicain. King y fustige donc à juste titre un modèle de société patriarcale promouvant le mariage comme porte d'entrée dans l'âge adulte. Ici la perspective du mariage est dépeinte comme une chape de plomb se refermant peu à peu sur April (Sherilyn Fenn), et de laquelle elle va s'éloigner pour assouvir ses désirs sans pouvoir échapper au sentiment de culpabilité, inhérent à l'adultère car réprouvé par la morale sociale.


La vision peut paraitre un poil caricaturale mais elle touche pourtant juste la plupart du temps, car soulignée par de jolis éclairs de mise en scène, certes bien discrets au milieu de cette esthétique de pub pour Manpower. Mais aussi car elle déteint étrangement dans un produit qui semble vendu sur les promesses anatomiques de son actrice principale et les pectos Michelin de son partenaire. On ne peut pas dire que le discours de Zalman King soit novateur ou réellement culotté (même la question du désir féminin est déjà un terrain largement défriché au cinéma). Mais il est toujours réjouissant de voir qu'un film en apparence calibré a quelque chose à raconter.

Créée

le 18 mai 2019

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magyalmar

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