Ce qui reste
Un simple drap pour raconter une histoire de fantôme. Comme si nous étions revenus à l'âge de l'enfance. Mais une histoire comme aucune autre. C'est une histoire sur ce qui reste. Comme la lumière...
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A Ghost Story n'est pas un histoire de revenant, plutôt d'errant; c'est passer de l'autre côté du miroir du deuil. Les âmes délivrées de leur enveloppe charnelle doivent aussi apprendre à passer la main, à se délivrer elles-mêmes de ce qui ne sera plus qu'une entrave dans le nouvel univers qu'elles doivent maintenant appréhender.
Ici, le fantôme n'en a pas fini avec ses émotions terrestres, la mort lui est finalement plus douloureuse et inacceptable que pour les vivants. Ceux qui restent ont plus de facilité à se débarrasser des restes. Restes de mémoire, restes d'amour évaporé, reste de projets inachevés. A Ghost Story, petit à petit, tisse sa trame et en vient à explorer un autre terrain que celui seul des sentiments. Un terrain plus glissant, ou plutôt plus mouvant; celui des questions dites "existentielles". L'éternité, un concept vague que les mathématiques seuls sont capables d'évaluer. Mais alors, les fantômes, les esprits récalcitrants savent-ls encore compter ? Le thème du doute de la perpétuité des éléments qui nous composent (spirituels, sensoriels, sentimentaux) est le coeur du postulat du film. Puisque le soleil lui-même est amené à mourir, sur quelle pérennité pouvons-nous compter ? Tel est l'enjeu ici exposé. Puisque Dieu n'existe pas, quel est le sens de la persistance à vouloir continuer d'exister ? Mais pas de nihilisme, l'amour n'a ni avenir ni passé, ne répond à aucune loi d'exclusivité, et son chemin est le seul possible à emprunter. Disparaître, se dissoudre...peut-être, mais dans l'amour global, sans se retourner, sans douter. Subsister est illusoire, aimer sans retour est la seule façon de cohabiter avec le néant...ou l'univers, les réponses s'échappent.
Formellement, A Ghost Story s'attarde à vous faire ressentir l'état de flottement, le désoeuvrement de cette âme perdue, désorientée, rongée encore par son humanité. Les longs plans-séquences pensifs se succèdent. C'est lent, c'est lourd, mais ce n'est pas long. C'est une journée sans but, sans passion. Les flashbacks récurrents sont autant de ressassements, les tableaux se répondent progressivement, comme pour souligner la fuite inexorable du temps. Rien ne sert de s'accrocher, tout finit par passer, ce n'est pas du ressort de notre volonté, encore moins quand nous sommes morts. En fin de journée, une lumière poudroie sur un visage affecté. Un petit tour et puis s'en va.
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le 5 oct. 2017
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