Un projet initialement de Kubrick finalement portée à l'écran pas Steven Spielberg, il faut bien avouer que c'est alléchant. C'est la rencontre de deux grandes figures du septième art, quand même ! Pourtant même si en effet le film ne manque ni d'intérêt et de singularité, il faut bien avouer qu'il possède aussi quelques points noirs, souvent trop importants d'ailleurs.
Nombreux sont ces films qui ont tentés le challenge de nous parler de l'intelligence artificielle, il y a bien sûr Kubrick qui en son temps avec 2001 : l'Odyssée de l'espace mettait en avant les sentiments et la morale de l'ordinateur Hal 9000 avec une caractérisation de la machine à la fois subtile et glaçante. On pense évidemment à Ridley Scott avec son Blade Runner, à Matrix des soeurs Wachowski, ou plus récemment au film Her de Spike Jonze, Ex_Machina d'Alex Garland et même Avengers : l'ère d'Ultron de Joss Whedon. Bref, autant de films qui ont tentés de mettre en avant la question du robot et de son intelligence, son mimétisme de l'être humain et peut-être même sa capacité à ressentir et éprouver des sentiments et des émotions. A.I. Intelligence Artificielle se classe évidemment parmi tout ces films-là et il se révèle même être l'un des meilleurs sur le sujet, tant la question y est ici abordée avec soin.
La candeur de l'enfant mécanique confronté à la cruauté de sa condition, le fil rouge de Pinocchio bien sûr, la fatalité de l'amour, tant de thèmes qui sont au coeur de ce récit sombre. A.I. est un conte sombre, un vrai. Une histoire tellement glauque qu'elle en devient parfois même très froide, Spielberg sait véritablement mettre en scène tout type d'émotions et par ailleurs qui mieux que lui, grand conteur moderne, pouvait raconter cette histoire ?
Malgré tout il faut bien avouer que le film peine parfois à rendre grâce à son sujet. Il est en effet difficile de ne pas rendre grâce à la direction artistique, qu'elle soit visuelle, sonore ou bien même abstraite, A.I. est une oeuvre si vaste dans sa forme, et c'est peut-être là que ça pêche concernant le fond.
Bien que l'on puisse évidemment noter de magnifiques scènes, notamment la partie aquatique sur Manathan, lorsque le petit robot se révèle finalement être le dernier témoin de l'espèce humaine face aux visiteurs extra-terrestre, dernier symbole d'une civilisation capable du pire pour continuer à rêver. Le long-métrage se révèle aussi, et malheureusement, être un long chemin de croix où les partitions pourtant si belles et oniriques de John Williams ne parviennent pas à faire oublier le jeu parfois trop archaïque du jeune Haley Joel Osment, le récit souvent trop redondant et les péripéties lacunaires. Bien souvent on se détache de l'histoire pour se contenter d'admirer la technique, là où justement cette dernière devrait servir à nous immiscer encore plus au coeur de cette intrigue. Intrigue qui décidément manque totalement de prestance. Non pas que l'ensemble ne soit pas touchant, Spielberg met parfaitement en scène le rejet, la tristesse, le souhait d'aimer et d'être aimé, le désir de vivre. Tout cette bonne volonté sacrifié au profit d'une critique qui peine à passionner.
A.I. est une oeuvre ambitieuse perdue dans un récit moyen et emballée dans le plus beau des paquets cadeaux que le cinéma puisse concevoir. Un Spielberg moyen qui aurait pourtant pu être une oeuvre majeure.